Rabat annonce l’arrestation de cinq soldats pour «complicité» avec «un réseau terroriste»
Par Abdelkrim Ghezali
Mardi dernier, le président tunisien prend la décision de limoger le chef de l’armée tunisienne, le général Rachid Ben Amar et le remplace par le chef des renseignements. Aucun communiqué officiel sur cette décision ni les raisons de ce limogeage n’a été annoncé. Mais la raison est que l’armée refuse d’intervenir et d’affronter les manifestants.
Quelques heures avant, des sites Internet et des forums publient une vidéo montrant des unités de l’armée tunisienne protégeant les manifestants contre les agents de police anti-émeute. Sur les vidéos, on pouvait entendre des manifestants crier « vive l’armée ».
Dans la même soirée de mardi, la chaîne iranienne « El Aâlem » diffuse un rapport selon lequel l’épouse du président Benali se serait enfuie à l’étranger avec ses filles. Des sites Internet de socialisation comme facebook, youtube et tweeter, publient des vidéo montrant d’importants regroupements de marocains et tunisiens à l’aéroport de Montréal après avoir été informés de l’arrivée de l’épouse du président tunisien avec sa fille et son beau fils. Selon ces sites, la police canadienne aurait aidée à s’enfuir Leila Benali et les membres de sa famille de crainte de les voir agressés par les immigrés tunisiens.
Mercredi matin, les autorités tunisiennes annoncent la décision du président de libérer toutes les personnes arrêtées lors des manifestations avant d’annoncer par la suite le limogeage du ministre de l’intérieur.
Le président Benali a par ailleurs ordonné une enquête sur l’implication de certains responsables, sans citer de noms, dans des affaires de corruption. Ce qui a été considéré par certains experts des affaires tunisiennes comme « de la poudre aux yeux », ou une tentation de maîtriser la situation. Malgré cela, les manifestations se sont poursuivit à Tunis et dans le reste des grandes villes tunisiennes jusqu’aux régions sud du pays aux frontières avec la Libye.
Il est entendu que kidnapper deux jeunes, un futur marié et son témoin, seulement là pour des noces, piégés par les circonstances, qui n’ont ainsi rien à voir avec la présence française en Afrique et la situation géostratégique du Niger et de son uranium, ne fait pas avancer la cause de quiconque veut un meilleur sort pour le continent. S’attaquer à des civils et risquer leur vie, personne ne peut soutenir et cautionner un tel acte.
Mais, dans ce qui s’avère être de plus en plus un fiasco, crier à la «barbarie» et tout mettre sur le dos des «barbares» est peut-être un peu trop facile. Un vieux truc éculé qui ne marche plus.
«J’ai appris hier dans l’avion qui m’emmenait de Fort-de-France à Pointe-à-Pitre l’assassinat particulièrement odieux de deux de nos compatriotes au Niger (…). C’est la nation toute entière qui condamne un acte barbare perpétré par des barbares, un acte d’une lâcheté inouïe», a déclaré depuis la Martinique M. Sarkozy au début de son discours de vœux aux Français d’outre-mer. «Ce crime odieux ne fait que renforcer la détermination de la France à lutter sans relâche contre le terrorisme et contre les terroristes. Les démocraties ne peuvent pas accepter cela», a-t-il ajouté. «Les démocraties, c’est leur honneur, c’est leur noblesse, doivent lutter pied à pied contre ces barbares venus d’un autre âge qui veulent terroriser le monde entier. Nous n’accepterons jamais le diktat des terroristes et du terrorisme»
D’ailleurs, ici et là des voix s’élèvent pour s’interroger sur les conditions de la mort de ces deux Français. Car enfin intervenir ainsi pour sauver les «otages», ça n’a de sens et de pertinence que si effectivement ça devait leur sauver la vie.
«La décision, il faut la prendre très vite : soit on y va, soit on laisse passer. Et ça devenait très dangereux pour les otages si on laissait passer», a déclaré l’état-major français.
À l’évidence, il s’avère que ça devient davantage périlleux pour eux de ne pas «laisser passer».
Il est possible que dans leur fuite, l’opération d’enlèvement compromise, les assaillants pourchassés aient décidé de ne plus s’encombrer d’otages.
Il est possible que des soldats nigériens mal préparés à ce genre de situation aient pu tirer sans prêter l’attention voulue aux captifs. Nous prenons acte pourtant des déclarations de M. Laouali Dan Dah, porte-parole du gouvernement nigérien, précisant que les forces nigériennes «n’ont pas voulu ouvrir le feu sérieusement de crainte de blesser les otages et de mettre leur vie en danger, raison pour laquelle les ravisseurs ont pu passer à travers les mailles du filet».
Il est tout aussi vraisemblable qu’il s’est agi d’un raté des forces spéciales françaises. Un de plus. On se souvient qu’en juillet dernier, lors d’une intervention similaire dans laquelle le service action de la DGSE (contre-espionnage) était intervenu, Michel Germaneau, militant humanitaire de 78 ans enlevé le 19 avril y a laissé la vie.
Il est à peu près certain que l’exécutif français voulait donner une leçon et désirait «coûte que coûte» en découdre avec les «terroristes» qui hantaient le désert sahélien. «J’assume !», droit dans ses bottes (posture dérisoire en la circonstance), clame le ministre de la Défense.
C’est très (c’est trop) facile.
Il faudra expliquer cela aux parents de ces deux jeunes partis à Niamey pour festoyer et qui leur reviennent dans des cercueils. C’est eux qui auront à assumer l’inconséquence d’une opération à la Sarkozy : vite fait, mal fait. Dans la précipitation, comme tout ce qu’il a entrepris jusque-là dans les autres domaines et qui a fait flop à tous les coups. Au point que parmi les hommes d’Etat dans les grandes réunions internationales, les déconfitures sarkoziennes s’ajoutent à celles de Berlusconi pour épicer l’attraction.
Qui douterait un seul instant que le président français alors en visite dans les Antilles, ignorait ce qui se passait ? Il est à peu près certain que l’hyper président suivait minute par minute le cours des événements et décidait de ce qu’il convenait de faire et des bribes de nouvelles qu’il convenait de distiller aux Français. En attendant de torcher un scénario vraisemblable.
De la même manière (mais cela est une autre histoire), qui douterait une seconde que les Américains, implantés discrètement dans la région, dédaigneraient de suivre en temps réel (peut-être même en s’en réjouissant secrètement) les instructifs déboires français ? Il est même fort probable qu’ils aient fourni de précieux renseignements aux Français, pour suivrent nuitamment le déplacement des ravisseurs.
Au passage, le «J’assume» du ministre fait office d’aveux. Pendant plus de 24 h, en effet, les autorités françaises étrangement silencieuses, ont laissé aux médias plus que complaisants le soin de laisser croire que l’opération militaire était le seul fait des forces nigériennes. Au moment où s’écrivent ces lignes, on ignore ce qui s’est réellement passé.
On le saura.
On apprend qu’en fin de compte, c’est au Mali que s’était déroulé le dernier épisode de cette triste affaire, avec pour acteurs les seules forces françaises. Au moment où se déroulaient ces événements, le Président français prétendait que l’armée nigérienne «semblait» toujours à la poursuite de leurs ravisseurs (AFP, S. 08/01/2011 à 16:22).
Même scénario en juillet et en septembre dernier. Les opérations sont d’abord imputées aux Mauritaniens ou aux Maliens (aujourd’hui aux Nigériens), alors que tout le monde sait que les 10 000 commandos français (peut-être davantage) déployés dans la région (dont la moitié au Mali) sont très proches du terrain et prennent toutes les initiatives à propos desquelles on peut se demander si les autorités des pays sont en état réel de les envisager, de les approuver ou de les discuter.
La vraie question qui n’a pas été traitée par les médias français qui ont réagi de manière Brejnévienne (qu’Alain Peyrefitte n’aurait pas renié, de l’époque où en «démocratie» française le ministre de l’Intérieur officiait à la tête de l’imprimatur de l’information publique sous la Vème République). Au fond, cela a-t-il vraiment et fondamentalement changé sous un régime libéral où les médias par dizaines, qu’ils soient publics ou privés, scandent une information formatée selon un codex unique d’apothicaires? Les téléspectateurs algériens le constatent à l’évidence.
Sans polémiquer on pouvait, en régime de liberté d’expression, oser quelques questions raisonnables.
Sur toutes les chaînes de TV de la République sarkozienne nous avons eu droit aux mêmes images et aux mêmes commentaires (à un Paul Quilès près qui a rompu timidement une unanimité sans tache). Avec des «experts ès terrorisme islamiste» qui bondissaient de plateaux en plateaux pour expliquer aux braves téléspectateurs la menace que représentaient les hordes de barbares hirsutes vouées à la perte de l’Hexagone et de l’Occident chrétien.
Certes, la décence incline au consensus national, mais pas au prix de l’effacement du principe d’opposition, aux fondements des sociétés politiques occidentales qui se posent en norme universelle.
Ou ce que l’on nous dit de la démocratie au ratio de laquelle on nous somme de nous conformer, sous peine d’être mis au ban de l’humanité fréquentable. Ou les préceptes démocratiques s’appliquent indifféremment à tous, sans exception et, dans ce cas, s’interroger est une vertu citoyenne.
Certes, la sécurité des opérateurs économiques devra être assurée et les Etats d’accueil devraient la garantir, plus particulièrement lorsque ces opérateurs sont étrangers. Toutefois, l’importance stratégique des ressources et de leur exploitation profitable pour toutes les parties ne devrait pas faire d’un pragmatisme dévoyé l’alpha et l’oméga des relations internationales, au point de reléguer la souveraineté des nations à une question subalterne. L’Afghanistan, l’Irak, le Soudan sont charcutés comme à la belle époque du XIXème au service des Compagnies Coloniales.
La question du Sahel n’est pas une question militaire et encore moins une question militaire extra-africaine. Il n’est ni dans l’intérêt de la France, ni dans ses prérogatives de s’improviser nouveau gendarme dans la région, de la Mer Rouge à l’Océan Atlantique.
A ce compte, un peu partout dans le monde, citoyens et hommes d’Etat français deviendront persona non grata et ne seraient plus les bienvenus nulle part.
Que Paris agisse pour son propre compte ou pour celui de Washington à l’ombre duquel elle a décidé de placer ses forces militaires et sa sécurité, ne change rien à l’affaire.
La tragédie de la disparition violente et cruelle de ces 2 jeunes français cache une tragédie plus vaste et plus inacceptable. Celle de la situation dans laquelle se trouve l’Afrique dans un monde entièrement dominé par des forces transnationales mondialisées pour lesquelles les Etats ne sont plus que des faire-valoir, déplacés sur un échiquier très peu préoccupé de la prospérité et de la sécurité des nations.
Des pans entiers de souveraineté ont été concédés à des groupes d’intérêts occultes dont on a du mal à identifier les contours et qui semblent organiser dans les coulisses la politique à entreprendre pour l’ensemble de la planète. On le voit de manière si caricaturale dans la gestion des dettes souveraines des Etats européens du sud : les marchés décident, les gouvernements s’alignent.
Soyons naïfs et interrogeons-nous : A-t-on vu cette scène singulière, celle d’un pays (le Portugal cette semaine), refuser une aide que le FMI et les marchés tiennent – sous une menace fermement réitérée – à lui apporter ?
De l’Egypte au Maghreb, sans oublier l’Afghanistan, l’Irak et les ex-pays de l’Est, le feu est allumé partout. Parce que partout les peuples sont soumis à un diktat inique : où ils consentent à un ordre économique où le seul avantage comparatif qui leur est proposé est d’offrir un travail sous-traité, docile et sous payé, ou on les bombarde. «Avec moi ou contre moi» criait Bush Jr.
Un peu partout, au cœur de la Mitteleuropa, nos voisins rejouent au XXIème siècle un jeu dangereux qui a fait führer au cours des années 30. Un jeu dont on connaît l’issue
Pendant qu’à Niamey on enlevait deux jeunes Français, le peuple tunisien, «peuple modèle» jusque-là, se mettait debout pour dire «non !» de manière plus évidente et plus visible (merci Internet !). On aura beau cacher les images venues de Tunis sous celles venues d’Alger où on ne peut plus museler la liberté d’expression des foules, il s’avérait clair que la pratique du deux poids, deux mesures ne pouvait se soustraire au regard de tous.
Derrière la Tunisie des complexes touristiques qui fait la fortune des transnationales du loisir industriel et de quelques nababs indigènes, il y a une Tunisie que tous faisaient mine de ne pas voir, celle que les vacanciers ne parviennent pas à distinguer à partir de Sidi Bou Saïd, de Hammamet, Houmt Essouk ou par-delà Bab El Khadra.
Parmi les clients du Club Med, se glissent selon les saisons ceux venus des Emirats, de la Libye voisine ou d’Algérie. Depuis que les islamistes ont mis la main sur l’ordre culturel du pays, les «touristes» algériens dérivés d’une nouvelle classe moyenne de parvenus, fuient leurs responsabilités le temps d’une libation estivale.
Dignitaires (gradés ou non), démocrates en chambre, francophones en perte de repères auxquels la France (et Dubaï) refuse la charité d’un visa, intellectuels libéraux éblouis par les réussites apparentes de leurs voisins et aveuglés par l’idée qu’il y a là un modèle à imiter, puisqu’ils s’avèrent incapables d’innover, nouvelle bourgeoisie islamiste reconvertie aux joies du capitalisme informel
Tout ce bric-à-brac d’Algériens se laisse servir après s’être servi, se retrouve dans un Maroc ou une Tunisie un peu comme au spectacle et s’adonnant aux récréations touristiques en se mêlant aux troupeaux de vacanciers septentrionaux. S’illusionnant comme eux.
Jamais le projet Blum-Violette n’aurait pu espérer tout cela.
Comment la classe politique française (conservateurs et «socialistes» confondus) qui s’est rassemblée au Maroc cet hiver pour délibérer discrètement du sort de 2012, fera-t-elle pour expliquer que dans les marches de l’Europe civilisée, on soutient des dictateurs à bout de bras, des autocrates qui tabassent les avocats dans des salles obscures, après des plaidoiries jugées hétérodoxes, des satrapes incultes qui utilisent des armes de guerre contre leur peuple ?
Sans doute, les enfants de Halq El Oued et de la Ghriba qui ont désormais pignon sur rue à Paris, ont plus de mal à verrouiller les réseaux d’information.
Comment les autorités françaises (et les entreprises qui les financent parce qu’ils y trouvent leur compte) pourraient-ils justifier le soutien apporté à leurs «amis» (rois et omnipotents héréditaires d’Egypte, du Maroc ou de Tunisie, lesquels se maintiennent au pouvoir avec des scores électoraux qui rappellent Staline, Ceauþescu, ou Chirac (2002) ? Et continuer à abandonner la Palestine à un ordre colonial raciste qui bafoue tous les jours, depuis 1948, les résolutions des Nations unies ?
En sorte que la question qu’il aurait été pertinent de poser pour ce qui concerne cette région du monde qui leur est historiquement liée – est celle des politiques internationales de la France et de l’Europe. La France et L’Union européenne sont les grandes absentes d’un espace abandonné aux soldats et aux techniciens de la guerre asymétrique, après avoir été concédé aux banquiers et aux affairistes.
À la suite de la mort tragique de ces jeunes Français au Niger, sans doute eût-il été opportun de dépêcher non pas un ministre de la Défense à Niamey, mais la ministre des Affaires etrangères (qui a d’ailleurs l’expérience des deux fonctions) voire le Premier ministre, pour montrer à quelle hauteur la France entendait placer les enjeux.
Mais évidemment, un ministre des Affaires étrangères ne sert que si on a une politique étrangère à proposer et à défendre
La Tunisie a, pendant longtemps, offert l’image d’un paisible pays de cocagne, certes écrasé par le long règne de Ben Ali, mais qui peut, au moins, se targuer d’une relative stabilité économique. Les récents événements enregistrés dans les régions les plus déshéritées du pays ont ainsi levé le voile sur la face hideuse du régime tunisien. L’image de la destination de rêve cède la place à celle d’un pays dont la population souffre des maux du chômage et de la pauvreté.
Le malaise social est intimement lié, selon les analystes et les observateurs, à la crise économique mondiale qui a induit une baisse drastique des revenus touristiques. Pour le régime Ben Ali, les mauvaises nouvelles se sont accumulées : essuyant une mauvaise récolte en 2010, le pays ne pouvait plus offrir d’emplois supplémentaires. Mais les raisons de la colère sont bien plus profondes. Ce n’est certes pas un hasard si la révolte a démarré dans les régions les plus pauvres du pays, loin des côtes et des décors sublimes qu’aime à offrir le président tunisien.
Les analystes soulignent que le développement économique, ces vingt dernières années, a profité d’abord aux zones côtières où se concentrent le tourisme, l’immobilier et les industries. A l’inégalité régionale, s’ajoute l’inégalité sociale. Les 10% les plus riches de la population perçoivent le tiers des revenus, les 30% les plus pauvres doivent se contenter de moins de 10% du PIB.
Les câbles distillés par le site WikiLeaks, quelques jours avant la révolte, n’ont fait que confirmer ce que tout le monde susurrait. Mais ces émeutes pourraient affecter davantage l’économie tunisienne. «Nous avons observé une baisse de l’activité touristique dans tous les pays où il y a eu des événements violents», a assuré Lahcen Achy, chercheur au centre Carnegie du Moyen-Orient, dans une récente intervention médiatique. «Cela a été le cas, quand il y a eu des attentats au Maroc en 2003, ou des actes terroristes en Egypte.» Mais cela risque de contaminer les autres secteurs dont dépend l’économie tunisienne, qui reste extrêmement fragile, d’autant qu’elle est largement tournée vers les exportations vers l’Europe.
Amel Blidi
El Watan, 13/1/2011
La Tunisie a, pendant longtemps, offert l’image d’un paisible pays de cocagne, certes écrasé par le long règne de Ben Ali, mais qui peut, au moins, se targuer d’une relative stabilité économique. Les récents événements enregistrés dans les régions les plus déshéritées du pays ont ainsi levé le voile sur la face hideuse du régime tunisien. L’image de la destination de rêve cède la place à celle d’un pays dont la population souffre des maux du chômage et de la pauvreté.
Le malaise social est intimement lié, selon les analystes et les observateurs, à la crise économique mondiale qui a induit une baisse drastique des revenus touristiques. Pour le régime Ben Ali, les mauvaises nouvelles se sont accumulées : essuyant une mauvaise récolte en 2010, le pays ne pouvait plus offrir d’emplois supplémentaires. Mais les raisons de la colère sont bien plus profondes. Ce n’est certes pas un hasard si la révolte a démarré dans les régions les plus pauvres du pays, loin des côtes et des décors sublimes qu’aime à offrir le président tunisien.
Les analystes soulignent que le développement économique, ces vingt dernières années, a profité d’abord aux zones côtières où se concentrent le tourisme, l’immobilier et les industries. A l’inégalité régionale, s’ajoute l’inégalité sociale. Les 10% les plus riches de la population perçoivent le tiers des revenus, les 30% les plus pauvres doivent se contenter de moins de 10% du PIB.
Les câbles distillés par le site WikiLeaks, quelques jours avant la révolte, n’ont fait que confirmer ce que tout le monde susurrait. Mais ces émeutes pourraient affecter davantage l’économie tunisienne. «Nous avons observé une baisse de l’activité touristique dans tous les pays où il y a eu des événements violents», a assuré Lahcen Achy, chercheur au centre Carnegie du Moyen-Orient, dans une récente intervention médiatique. «Cela a été le cas, quand il y a eu des attentats au Maroc en 2003, ou des actes terroristes en Egypte.» Mais cela risque de contaminer les autres secteurs dont dépend l’économie tunisienne, qui reste extrêmement fragile, d’autant qu’elle est largement tournée vers les exportations vers l’Europe.
Amel Blidi
El Watan, 13/1/2011
« Nous nous attendions du gouvernement qu’il prenne une position claire par rapport aux récents évènements survenus au Sahara occidental », ont dit les députés Carmen Motta (Parti démocratique) et Paul Grima (Ligue du Nord), en réaction à la réponse du secrétaire d’Etat auprès du ministère des Affaires étrangères, Alfredo Mantica, à une interpellation du gouvernement à la chambre des députés sur la situation des droits de l’homme dans les territoires sahraouis.
Mardi dernier, Mantica avait seulement rappelé les propos du chef de la diplomatie italienne, Franco Frattini, après les évènements d’El-Aaiun occupée du 14 novembre 2010, lors du démantèlement sanglant du « camp de la liberté », par les forces de répression marocaines, selon lesquels l’Italie suivait « avec préoccupation » ce qui se passe au Sahara occidental.
Ces deux députés, membres de l’intergroupe parlementaire d’amitié avec le peuple sahraoui, ont appelé à la nécessité pour le gouvernement italien et l’Union européenne de faire montre d’ »une diplomatie plus efficace » pour que soit mise en place une commission d’enquête indépendante pour faire la lumière sur les évènements d’El Aaiun.
Le Parlement européen avait voté le 25 novembre une résolution demandant la création d’une telle structure, sous l’égide des Nations unies.
« Nous demandons que la MINURSO, qui opère dans la région dont le mandat expire le 11 avril prochain, soit également chargée de veiller des droits de l’homme », ont ajouté les deux parlementaires.
Sur l’aide humanitaire, ils ont appelé le gouvernement « à fournir davantage de ressources » aux réfugiés sahraouis, estimant que celles-ci ont nettement diminué en 2010″. Les deux parlementaires ont par ailleurs, insisté sur la nécessité pour l’Italie et l’Europe d’agir « plus activement » dans le processus de paix au Sahara Occidental, pour le « plein respect » des nombreuses résolutions de l’ONU réaffirmant maintes fois, le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui.
A ce sujet, le représentant du gouvernement avait souligné que l’ONU est « le seul cadre dans lequel, il pourrait y avoir une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, conformément aux résolutions adoptées par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale ».(SPS)
Le débat a fait suite à une question de la députée italienne, Carmen Motta (Parti démocratique), adressée au gouvernement, portant sur sa position à propos des évènements sanglants d’El Aaiun et de la situation des droits de l’homme au Sahara occidental occupé par le Maroc.
Dans sa réponse, au nom du gouvernement, le secrétaire d’Etat auprès du ministère italien des Affaires étrangères, M. Alfredo Mantica, a assuré que l’Italie « suit de près le différend entre le Maroc et le Front Polisario sur le Sahara occidental, en étroite coordination avec ses partenaires européens ».
Il a ajouté que sur le plan bilatéral et multilatéral, « nous avons demandé à plusieurs reprises aux deux parties de maintenir un dialogue ouvert, sans conditions préalables, pour parvenir à des résultats concrets dans les négociations en cours sous les auspices de l’Organisation des Nations unies ».
Mantica a souligné, à cet égard, que l’Onu est « le seul cadre dans lequel il pourrait y avoir une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, conformément aux résolutions adoptées par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale ».
C’est pourquoi, a-t-il affirmé, l’Italie « soutient pleinement » l’action de la médiation menée par le secrétaire général des Nations unies et son envoyé personnel, rappelant que son pays contribue, depuis sa création, à la mission de l’Onu dans la région (Minurso).
« Nous nous sommes félicités de la récente reprise des discussions informelles entre Maroc et le Front Polisario. Pour la première fois, les parties ont discuté (…) des aspects opérationnels du programme qui vise à renforcer la confiance mutuelle, géré par le Haut commissariat au réfugiés (HCR), parvenant à un accord permettant la reprise des visites entre les familles sahraouies », a-t-il souligné.
Le ministre italien a rappelé, en outre, que deux rounds de négociations sont prévus pour la première moitié de cette année, estimant qu’il y a des « signes encourageants ».
Evoquant la situation humanitaire, M. Mantica a affirmé que le gouvernement italien suivait « sans relâche », avec l’Union européenne et les partenaires internationaux, les conditions au Sahara occidental et dans les camps de réfugiés.
Il a rappelé, dans ce cadre, que le 9 novembre dernier, le ministre italien des Affaires étrangères avait exprimé « sa grande préoccupation pour les victimes et les nombreux blessés des affrontements ayant suivi » le démantèlement par les forces marocaines du camp de Gdeim Izik.
M. Frattini avait alors appelé les parties à poursuivre un dialogue constructif lors des négociations sous les auspices de l’Onu pour trouver une solution pacifique et « maintenir le calme nécessaire et la retenue afin d’éviter d’autres affrontements qui causeraient de nouvelles effusions de sang ».
Le secrétaire d’Etat a souligné que « l’Italie a également accueilli favorablement la résolution, le 25 novembre, du Parlement européen, demandant à l’Organisation des Nations unies d’aider à faire la lumière sur les incidents dans le camp de Gdeim Izik, et à la Commission européenne d’assurer une circulation suffisante de l’aide humanitaire ».
Concernant ce dernier point, il a indiqué que son pays a depuis longtemps été « à la pointe », avec un « engagement important » de sa coopération, de l’aide humanitaire et alimentaire fournie aux réfugiés sahraouis.
M. Mantica a rappelé, à cet égard, qu’en 2010, l’Italie a contribué pour un montant de 300.000 euros au Programme alimentaire mondial (PAM), ajoutant que la liste des produits alimentaires a été convenue avec le représentant du Front Polisario en Italie.
« Nous avons, également, contribué, pour 530.000 euros, au financement des activités du HCR dans les camps de réfugiés, afin de combattre la malnutrition, surtout chez les enfants, améliorer l’accès aux soins médicaux de base et les conditions d’hygiène et encourager l’échange de visites entre les familles sahraouies », a-t-il poursuivi.
Dans sa réponse, la députée Carmen Motta a dit qu’il était attendu « plus de courage » de la part du gouvernement dans sa « position par rapport aux incidents graves au Sahara occidental ».
Elle a salué la référence du représentant du gouvernement à la résolution adoptée par le Parlement européen à propos des évènements d’El Aaiun, préconisant la mise en place d’une « enquête internationale indépendante » pour faire la lumière sur ces évènements ainsi qu’un « mécanisme de surveillance des droits de l’homme au Sahara occidental ».
La députée a conclu en exprimant l’espoir que la position de l’Italie sera « en faveur de la paix, de l’autodétermination et du respect des droits humains fondamentaux » au Sahara occidental. (SPS)
Des voitures de la police marocaine ont empêché les pêcheurs sahraouis de se rendre à leurs bateaux. Cet acte a conduit à des affrontements avec la police marocaine soutenue par des colons marocains contre les Sahraouis.
Selon des témoins oculaires, les colons marocains étaient armés de couteaux et de batons, a ajouté la même source, regrettant que « la police marocaine n’a pas réagi pour empêcher ces affrontements ». (SPS)