Étiquette : Israël

  • Algérie-Maroc : Mohammed VI tente la carte de l’apaisement

    C’est un revirement diplomatique spectaculaire que vient d’opérer le roi du Maroc à l’égard de l’Algérie. Alors que la tension entre les deux pays a quasiment franchi le point non-retour ces derniers jours suite au dérapage dangereux de l’ambassadeur marocain à l’ONU, mais aussi d’espionnage d’Algériens par le Makhzen par voie du logiciel Israélien Pegasus, voici que Mohamed VI fait volte-face et tente de faire jouer la carte de l’apaisement en saisissant l’opportunité de son discours prononcé samedi, à l’occasion de la fête du Trône.

    Par Feriel Nourine

    Contre toute attente, Mohamed VI déplore la «tension» qui caractérise ces derniers temps les relations entre les deux pays. Dans ce sillage, il n’a pas manqué de réitérer son appel à rouvrir les frontières terrestres entre les deux pays.

    Dans son allocution qu’il adresse au peuple marocain chaque année en pareille circonstance depuis son intronisation il y a 22 ans, le souverain marocain a réservé de longs passages à destination de l’Algérie. «Vous n’aurez jamais à craindre de la malveillance de le part du Maroc. La sécurité et la stabilité de l’Algérie, et la quiétude de son peuple sont organiquement liées à la sécurité et à la stabilité de Maroc», a-t-il dit à ce propos.

    Il a prôné ce type de discours après avoir proposé d’«œuvrer de concert» avec l’Algérie et «sans conditions à l’établissement de relations bilatérales fondées sur la confiance, le dialogue et le bon voisinage».

    Mohammed VI fait cette proposition en se disant non satisfait de l’état actuel des relations entre les deux pays, «car il ne sert en rien les intérêts respectifs de nos deux peuples» et «il est même jugé inacceptable par bon nombre de pays», se surprend-il à constater, avant d’inviter Abdelmadjid Tebboune «à faire prévaloir la sagesse» et «œuvrer à l’unisson au développement des rapports fraternels tissés entre les peuples des deux pays».

    Dans la même logique, il réitérera son appel à la réouverture des frontières entre les deux pays voisins, en tentant encore de rassurer contre tout risque de danger que provoquerait cette réouverture. Référence faite au trafic de cannabis, mais aussi à la normalisation opérée entre le Makhzen et l’entité sioniste.

    Des menaces qui n’empêchent pas pour autant le roi marocain d’estimer que «l’état normal des choses» entre l’Algérie et le Maroc est que les frontières «soient et demeurent ouvertes». Selon sa vision, «les raisons ayant conduit à la fermeture des frontières sont totalement dépassées et n’ont plus raison d’être aujourd’hui».

    Pour rappel, la fermeture des frontières terrestres entre l’Algérie et le Maroc a été décidée par les autorités algériennes en 2014, en guise de riposte à la décision du Maroc d’imposer un visa d’entrer sur son territoire aux citoyens algériens.
    Ce visa a, par la suite, été supprimé, mais l’Algérie a décidé de maintenir ses frontières fermées, justifiant sa position par l’attitude agressive adoptée à son encontre par les autorités marocaines. Dans une interview accordée à l’hebdomadaire français Le Point, en mai dernier, Abdelamdjid Tebboune avait expliqué cette position. «On ne peut pas ouvrir les frontières avec un vis-à-vis qui vous agresse quotidiennement», avait-il déclaré, soulignant que «le Maroc a toujours été l’agresseur» et que «nous n’agressons jamais notre voisin.», mais que «nous riposterons si nous sommes attaqués».

    Un Maroc agresseur qui n’a pas cessé de l’être depuis, ni d’observer une trêve dans son offensive d’espérer de porter atteinte à l’image de l’Algérie. C’est pourquoi, l‘invitation à l’apaisement fraîchement lancée par Mohammed VI a tout d’une grosse surprise dans l’état actuel des relations entre les deux pays. Si le souverain marocain daigne enfin ouvrir les yeux sur la détérioration de ces relations, il n’hésite pas à se taire sur les paramètres qui en sont à l’origine. A l’exemple de la toute récente machination vainement orchestrée par le représentant du Makhzen à l’ONU qui a affiché publiquement le soutien de son pays à un prétendu «droit à l’autodétermination du peuple Kabyle».

    Une vile manœuvre suivie quelques jours après par l’éclatement du scandale d’espionnage opéré par les services marocains sur des Algériens en recourant aux prestations du logiciel Pegasus commercialisé par le groupe israélien NSO.

    La question qui se pose aujourd’hui concerne en premier lieu le pourquoi de cette sortie du roi du Maroc, considérée comme tardive après la combine que s’est autorisée son ambassadeur à New-York, et qui a poussé Alger à rappeler son ambassadeur à Rabat après n’avoir constaté aucune réaction sur ce dossier en provenance des autorités marocaines.

    Mohammed VI tente-t-il donc de rectifier le tir et d’essayer de sauver ce qui peut être encore sauvé dans ses relations avec l’Algérie ? Si c’est le cas, on voit bien qu’il prend le soin diplomatique de choisir ses mots et ses phrases pour déculpabiliser le Makhzen dans cette affaire de tension dangereuse entre les deux pays.

    Reporters, 02/08/2021

    Etiquettes : Maroc, Algérie, Mohammed VI, Frontières, Israël, #Maroc #Algérie

  • Un international marocain honteusement malmené par des supporters israéliens

    Un international marocain honteusement malmené par des supporters israéliens

    Achraf Hakimi n’est pas près d’oublier cette amère expérience pour ne pas dire qu’il s’en souviendra toujours. L’international marocain et défenseur latéral nouvellement recruté par le Paris Saint-Germain (PSG), a été sifflé et insulté à outrance par des supporters sionistes.

    L’international marocain a participé dimanche à la rencontre de gala opposant son équipe au LOSC Lille, dans le cadre du Trophée des champions.

    Ce match de gala s’est disputé cette année dans le Bloomfield Stadium de Tel-Aviv. Une occasion pour les supporters sionistes de s’en prendre à Achraf Hakimi, recruté à prix d’or par le PSG. Ce dernier, dès qu’il touchait le ballon, se faisait siffler, huer et insulter par les 29.000 personnes présentes dans le stade.

    La raison de ce lynchage ? Hakimi a exprimé au mois de mai son soutien au peuple palestinien, notamment à Ghaza où les bombardements de l’occupant étaient d’une violence extrême.

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    Tout le monde s’accorde à dire que le joueur de 22 ans paie le tribut de son soutien à la cause palestinienne. Lors de l’agression du mois de mai, il a publié « Free Palestine » sur son Twitter.

    Pour rappel, L’opinion publique marocaine est unanime dans la condamnation de la décision du roi du Maroc de normaliser avec Israël en échange d’une reconnaissance par Donald Trump de la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental occupé  devenue, depuis, surannée.

    Etiquettes : Maroc, Israël, Achraf Hakimi, Paris Saint-Germain, PSG, #Maroc #Israël

  • Le sort des Palestiniens est bien compris, maintenant il faut agir

    « J’en ai assez de rapporter la même brutalité tous les jours, de penser à de nouvelles façons de décrire l’évidence. »

    Ce sont les mots de Mohammed El-Kurd, le célèbre activiste palestinien de Jérusalem-Est. Lui et sa famille sont menacés d’expulsion de leurs foyers. Ils n’ont commis aucun crime, mais sont expulsés uniquement et exclusivement parce qu’ils ne sont pas juifs, et Israël est un État suprémaciste juif.

    Mohammed et sa sœur Muna El-Kurd ont bénéficié d’une hausse de l’attention des médias en mai-juin, lorsque la guerre israélienne contre Gaza a été résistée par le « soulèvement de l’unité » palestinien. Maintenant, cela s’est calmé. Mais le sort des Palestiniens reste le même.

    « La situation à Sheikh Jarrah n’est pas difficile à comprendre », a écrit Mohammed dans son article d’opinion guardian début cette semaine. « C’est une illustration parfaite du colonialisme colonisateur, un microcosme de la réalité pour les Palestiniens à travers 73 ans de régime sioniste. »

    Le sionisme, l’idéologie officiellement sanctionnée – et uniquement protégée par la loi – d’Israël est raciste.

    La lassitude apparente d’El Kurd de devoir imaginer de nouvelles façons imaginatives de dire et d’écrire la même chose jour après jour, semaine après semaine, est malheureusement familière à ceux d’entre nous qui font état des injustices commises contre les Palestiniens comme de leur travail.

    L’épuration ethnique est une erreur. La suprématie ethnoreligieuse est une erreur. Tuer des enfants est une erreur.

    Israël a tué 11 enfants palestiniens en Cisjordanie depuis le début de l’année. Et cela s’ajoute aux 60 enfants de Gaza qu’il a tués au cours de la même période.

    Vendredi dernier, des voyous de l’armée israélienne ont abattu de sang-froid un enfant palestinien de 17 ans.

    Muhammad Munir Tamimi faisait partie d’un groupe qui avait affronté une bande de soldats israéliens lourdement armés envahissant leur village avec rien de plus que des pierres. Les Israéliens ont même bloqué l’évacuation de l’adolescent grièvement blessé vers un hôpital de Ramallah alors qu’il saignait de ses tripes – ce dont les soldats israéliens ont l’habitude.

    Tamimi est mort de ses blessures plus tard dans la nuit.

    Mercredi, un autre enfant palestinien a été touché par des tirs de l’armée israélienne.

    Mohammad Mo’ayyad Bahjat Abu Sara, 11 ans, a été abattu sous la grêle des balles israéliennes qui ont frappé la voiture que lui-même, son père et sa famille utilisaient pour faire ses courses. Six soldats israéliens avaient fait exploser la voiture avec pas moins de 13 balles, selon des témoins oculaires.

    Les médias palestiniens ont publié des photos poignantes de la voiture avec ses épiceries abandonnées, y compris des sacs de pain apparemment recouverts du sang de l’enfant mort.

    Comme vous pouvez le voir dans les tweets intégrés ci-dessus, le groupe de défense des droits humains Defence for Children International , la Palestine joue un rôle clé dans la documentation de ces crimes israéliens contre les Palestiniens.

    En raison du travail remarquable et essentiel de la DCIP en matière de droits de l’homme dans la protection des enfants palestiniens, Israël a maintenant commis un autre acte de répression contre le groupe.

    Aux premières heures de la matinée d’hier, des voyous de l’armée israélienne ont fait irruppir le bureau de la DCIPen Cisjordanie, volant des ordinateurs, des fichiers clients et des disques durs. Le groupe de défense des droits de l’homme a déclaré qu’aucun document n’avait été laissé dans le bureau pour donner une indication sur la raison de la perquisition et qu’il n’avait laissé derrière lui aucune réception de matériel saisi.

    Khaled Quzmar, directeur général du DCIP, a déclaré : « Ce dernier acte des autorités israéliennes fait avancer une campagne en cours pour réduire au silence et éliminer la société civile palestinienne et les organisations de défense des droits humains comme le DCIP. »

    Le groupe a appelé les autorités israéliennes à mettre immédiatement fin à leurs persécutions des groupes palestiniens de défense des droits humains, exigeant que « la communauté internationale tienne les autorités israéliennes responsables ».

    C’est exactement ce qui manque.

    Comme Mohammed El-Kurd y a fait allusion, le sort des Palestiniens est probablement l’une des injustices les plus bien comprises, bien expliquées et bien documentées de l’histoire.

    Comme il l’a conclu dans son article du Guardian : « Le problème n’est pas l’ignorance, c’est l’inaction. » Il n’y a pas de volonté politique en Occident de demander des comptes à Israël pour ses crimes.

    Nous devons agir pour faire en sorte que cela change, et rapidement.Mohammad al-Kurd à Jérusalem le 02 juin 2021. [Mostafa Alkharouf – Agence Anadolu]

    Mohammad al-Kurd à Jérusalem le 02 juin 2021. [Mostafa Alkharouf – Agence Anadolu]

    Article traduit de l’Anglais

    Salim Sellami Blog, 30/07/2021

    Etiquettes : Palestine, Israël, répression, Ghaza, Cisjordanie, #Palestine

  • Joseph Breham : « La réaction de la France dans l’affaire Pegasus est en phase avec son agenouillement face au Maroc »

    Avocat français d’un chef du Polisario, Joseph Breham a été espionné par le Maroc entre septembre et décembre 2019. C’est ce que révèle Forbidden Stories, consortium international de journalistes

    Par Nadia Henni-Moulaï 
    PARIS, France
    Alerté par la cellule investigations de Radio France, l’avocat parisien Joseph Breham a été victime d’espionnage entre septembre et décembre 2019. Spécialiste des droits de l’homme, il est ciblé par le Maroc pour sa défense de militants de la cause saharaouie.
    Le puissant logiciel espion Pegasus, créé par la société israélienne NSO Group, se serait activé sur le téléphone portable de l’avocat grâce à trois iMessages envoyés, selon lui, à trois mois d’intervalle.
    C’est ce que révèle l’examen de son portable par le Security Lab d’Amnesty International, membre du projet Pegasus. Cette vaste enquête menée par le consortium international de journalistes Forbidden Stories, dont Radio France fait partie, a provoqué une déflagration internationale.
    En France, le Maroc, pays allié, est sous le feu des critiques. Le royaume multiplie les procédures en diffamation contre les médias du consortium.
    Middle East Eye : Vous êtes l’avocat de Claude Mangin, épouse de Nâama Asfari, militant sahraoui condamné à 30 ans de prison en 2013 par un tribunal militaire de Rabat, et c’est à ce titre que vous avez été espionné. Pourriez-vous nous expliquer qui est Claude Mangin ?
    Joseph Breham : Claude Mangin est une professeure d’histoire retraitée qui a épousé monsieur Nâama Asfari en 2003. Ils se sont rencontrés en France pendant qu’il faisait un doctorat à la Sorbonne. Nâama Asfari a la particularité d’être Sahraoui, c’est-à-dire membre du dernier peuple colonisé d’Afrique. En effet, il est né au Sahara occidental, qui est, selon la définition de l’ONU, « un territoire non autonome » colonisé par le Maroc depuis 1963.
    MEE : La fameuse question du Sahara occidental au cœur des écoutes marocaines vis-à-vis de l’Algérie et même de la France…
    JB : En ce qui me concerne, mais aussi Claude Mangin, Philippe Bouyssou, maire [communiste] d’Ivry-sur-Seine [dont le conseil municipal a délibéré le 30 juin d’une subvention en faveur des enfants sahraouis], et Bachir Oubi Bouchraya, ambassadeur de la République arabe sahraouie démocratique [RASD], la réponse est oui. Je ne suis pas convaincu en revanche que ce soit le cas pour l’écoute d’Emmanuel Macron ou de journalistes marocains.
    MEE : Au-delà de l’ampleur, en quoi cette affaire est-elle différente, voire plus grave, que la surveillance à grande échelle mise en place par la CIA et la NSA américaines et révélée par l’un de ses anciens informaticiens, Edward Snowden ?
    JB : Pegasus, par rapport à Snowden et la NSA, c’est un étage de plus de la pyramide. L’affaire Snowden nous a montré que toutes les communications étaient interceptées ou interceptables. Pour se protéger de cela, on a vu dans les mois et les années suivantes le développement du cryptage. Il est toujours possible de capter des données mais celles-ci ne peuvent pas être lues directement. Il faut donc consacrer du temps et de l’argent pour les utiliser.
    Le logiciel Pegasus – et d’autres d’ailleurs – infiltre directement les téléphones, non plus de la masse mais de personnes ciblées. Le logiciel va prendre le contrôle du téléphone. Qu’il y ait cryptage ou non de vos données, on s’en fiche puisque Pegasus va directement à la source pour obtenir vos informations. Plus inquiétant, on peut contrôler les infos que vous allez envoyer et en transmettre sans que vous n’ayez donné votre accord.
    MEE : Cela signifie bien que des messageries telles que Telegram ou Signal, largement utilisées par des personnalités politiques, sont inutiles…
    JB : Effectivement. Elles ne servent à rien contre des logiciels de type Pegasus.
    MEE : « Si ces faits sont avérés, ils sont très graves », a déclaré l’Élysée. Jeudi dernier, le président Emmanuel Macron a réuni un conseil de défense exceptionnel à la suite de cette affaire. Malgré les investigations étayées de Forbidden Stories, le gouvernement joue la carte de la prudence. Que raconte la position de la France après ces révélations ?
    JB : La position de la France est déplorable mais pas étonnante. Elle est parfaitement en phase avec l’agenouillement français dans le cadre des relations avec le Maroc. Sous Hassan II et à partir de François Mitterrand, il y a eu globalement une politique pensée et organisée par le Maroc pour créer de bonnes relations avec la France.
    Cette stratégie s’est mise en place à plusieurs niveaux. La politique, ce que l’on a appelé la « mamouniasation » de la classe politique française [en référence à La Mamounia, mythique hôtel de luxe de Marrakech qui voit défiler des personnalités politiques françaises], de ses décideurs ou de chefs d’entreprise, consiste à les inviter, leur offrir des cadeaux voire assurer un financement de la vie politique française à un niveau assez conséquent.
    Avec un but, s’assurer qu’en cas de nouvelle enquête type Notre ami le roi, les leaders français ne relaient pas le scandale énorme qu’avait provoqué ce livre de Gilles Perrault. Tout d’un coup, la population française s’était rendu compte qu’il n’y avait pas que Marrakech et les charmeurs de serpents. Le Maroc, c’était aussi les bagnes, les détentions secrètes et la torture.
    D’ailleurs, à la suite de ce scandale, un certain nombre de prisonniers avaient été libérés. Pour avoir discuté avec certains d’entre eux, je peux vous dire que les conditions de détention étaient horribles.
    MEE : Comment s’est opérée cette stratégie de séduction ?
    JB : Il s’agissait de créer un mélange de liens institutionnels très forts et de liens personnels, voire de compromission, avec un certain nombre de membres de la classe dirigeante française. La politique de la « mamouniasation » s’est élargie à différentes personnalités du monde des arts, des lettres, du cinéma… Sous Jacques Chirac, cela a commencé à porter ses fruits et s’est perpétué avec tous les présidents suivants.
    Je peux parler d’un exemple tiré de mon expérience d’avocat. En 2014, au nom d’un certain nombre de clients dont Claude Mangin et Nâama Asfari, nous déposons des plaintes pour torture contre différentes personnes dont Abdellatif Hammouchi, directeur de la DGSN [Direction générale de la sûreté nationale, la police marocaine].
    Dans le cadre de ces plaintes, j’indique à la juge d’instruction que M. Hammouchi, qui se trouve alors en France, va être interviewé dans les heures qui suivent à Neuilly-sur-Seine, par des journalistes. En temps normal, nous ne sommes jamais informés de la venue de M. Hammouchi sur le sol français. Il se déplace sous de faux noms. Je demande à la juge de saisir l’occasion pour l’interroger. Elle envoie alors une convocation à l’intéressé pour l’entendre dans le cadre des plaintes en question.
    Non seulement Abdellatif Hammouchi ne viendra pas, mais le Maroc fera un énorme scandale à ce sujet. Les amis français du Maroc entrent dans la danse. Le Maroc suspend la convention judiciaire bilatérale avec la France.
    MEE : En quoi cet épisode qui concerne Abdellatif Hammouchi, super flic du royaume accusé d’être à l’origine de l’espionnage marocain, éclaire-t-il cette affaire Pegasus et plus globalement les relations franco-marocaines ?
    JB : Justement, la suspension de cet accord, qui comprend un volet pénal, montre que le Maroc ne veut plus collaborer. Le pays refuse alors de jouer le jeu. Surtout, la France conteste mollement et finit pas se coucher devant les autorités marocaines. Elle accepte un protocole d’accord modifiant la convention, dans un sens contraire au droit international pénal et à tous ses autres engagements internationaux dans ce domaine.
    Ce protocole dit, en substance, que quand une infraction qui relève du droit français est commise à l’étranger (au Maroc en l’occurrence), la France doit vérifier si elle est recevable et ensuite renvoyer [le dossier] au Maroc. Quand on a des cas de torture – qui relèvent de la compétence universelle, selon laquelle il suffit que l’auteur ait mis un pied sur le sol français pour pouvoir déposer la plainte –, on doit renvoyer au Maroc pour faire jouer cette compétence. Je vous laisse imaginer à quel point les services secrets marocains ont envie de démontrer que leurs services torturent…
    Pour vous donner un exemple très pratique, concernant le cas de Nâama Asafari, on a une décision du comité contre la torture des Nations unies qui incluait à l’époque un membre marocain. Ce comité a déclaré que le Maroc avait violé la convention onusienne contre la torture. Malgré les allégations de torture contre M. Asfari, le Maroc n’a mené aucune enquête sérieuse. Dans le cadre de ces obligations, le Maroc a considéré qu’il n’y avait rien et que tout cela était le produit de machinations.
    MEE : Au-delà de la « mamouniasation » de la vie politique française, sur quoi repose ce rapport de force que le Maroc parvient à instaurer en France. Un rapport de force qui s’apparente aussi à du soft power, vecteur utilisé par bien d’autres États et dont on pourrait considérer que le Maroc aurait tort de se priver…
    JB : Ce qui est certain est que la France est en perte de vitesse en Afrique subsaharienne. En même temps, le Maroc devient un des pays africains les plus importants. L’Algérie s’enfonce dans une situation complexe. La Tunisie n’est pas encore sortie des soubresauts de la « révolution du jasmin ». La Libye est ce qu’elle est avec la menace terroriste.
    Par voie de conséquence, le Maroc est devenu le phare, actuellement, de cette région. Aux yeux de l’administration française, construire une relation à long terme n’est possible qu’avec le Maroc.
    MEE : Dans l’ère post-Me Too, l’affaire Pegasus montre aussi l’enjeu de la vie privée. Omar Radi, journaliste marocain accusé de viol, en est un exemple. L’État marocain est-il coutumier de ces méthodes ? Je pense aussi à l’affaire Fouad Abdelmoumni, militant marocain des droits humains, dont des scènes intimes auraient été divulguées, par le pouvoir marocain selon lui…
    JB : Il s’agit selon moi d’un point fondamental. L’État marocain exercerait une pression sur un certain nombre de décideurs français et françaises.
    MEE : Est-ce que vous pensez à des affaires de mœurs ?
    JB : C’est la méthode du kompromat [faire chanter ses ennemis avec des informations compromettantes]. Quand on détient le téléphone portable de quelqu’un, on sait tout de cette personne. Quand une personnalité loue une villa à Marrakech, vous savez si elle vient avec des amis jeunes ou non, si elle a perçu de l’argent ou non, etc.
    Je pense que la France non seulement ne fera rien mais qu’elle fera tout pour que le Maroc s’en sorte. Un exemple ? Après le scandale de 2014, Hammouchi a été fait chevalier de la Légion d’honneur…
    Par ailleurs, une note du ministère de la Justice a été envoyée pour dire que c’était inadmissible [que la justice] convoque des officiels d’un pays étranger. La première personne qui a reçu cette note est la doyenne des juges d’instruction de Paris… qui avait convoqué Abdellatif Hammouchi.
    MEE : Outre les 41 pays clients dans l’affaire Pegasus, un État se trouve au cœur du scandale, Israël, du fait de l’entreprise NSO. La France est-elle un terrain de jeux pour Israël ?
    JB : Ce que je peux dire et de ce que j’ai lu, c’est que les services [de renseignement] israéliens valident les pays [ayant droit d’être] utilisateurs du logiciel Pegasus. Israël est, a priori, une démocratie. Or, ce type de logiciels est le produit de démocraties.
    C’est une course permanente entre ceux qui piratent et ceux qui protègent (globalement, Apple et Google, même s’ils ont de nombreux autres défauts). Il suffirait de limiter les milliers de petites mains qui sont derrière ces entreprises pour qu’elles perdent la course.
    Ce qui revient à dire que ce sont des démocraties qui donnent à des dictatures la possibilité d’espionner leurs propres citoyens.
    MEE : L’espionnage n’est pas une pratique inédite depuis les prémices de l’humanité. Mais aujourd’hui, on est dans une cyberguerre bien installée…
    JB : On a mis un terme à l’utilisation des pires armes de guerre. Depuis, on vide les stocks. Avec la convention d’Oslo entrée en vigueur le 1er août 2010, les armes à sous-munitions sont interdites. On en utilise encore, par exemple au Yémen, mais ce sont de vieux stocks vendus dans les années 70. Le nombre de morts par sous-munitions, c’est-à-dire principalement des civils, a été divisé par dix.
    Ce que l’on a réussi à faire pour la guerre classique, pourquoi ne le fait-on pas pour la cyberguerre ? Je pense que l’on est au tout début de ce processus. Les sociétés civiles ne s’en aperçoivent que maintenant. Les crimes de guerre par bombardements de masse, le monde a découvert cela pendant la Seconde Guerre mondiale, alors que la convention d’Olso ne date que de 2010…
    MEE : Les sociétés civiles voient-elles la cyberguerre comme quelque chose de très abstrait alors même qu’elle aboutit à des assassinats ciblés comme pour le journaliste saoudien Jamal Khashoggi ?
    JB : L’enseignement de cette affaire est que cet espionnage ciblé conduit à des accusations de viols complètement bidon, comme pour le journaliste marocain Omar Raddi, ou à des assassinats, tel, vous le rappelez, celui du journaliste saoudien Jamal Khashoggi.
    La contestation vient souvent d’une poignée de leaders. Ces dictatures ont tout intérêt à les éliminer. C’est ce qui s’est passé en Arabie saoudite, au Maroc ou en Inde [où plus de 300 personnes ont potentiellement été espionnées au moyen de Pegasus].
    Cet espionnage, ces accusations ou ces assassinats servent à museler toute contestation. Paradoxalement, le Maroc ne doit pas être mécontent de cette publicité. Ce scandale Pegasus permet de montrer que cet État a les moyens de cibler sa population.
    MEE : L’affaire Pegasus soulève le rôle des réseaux sociaux qui sont, en fait, des outils de surveillance de masse, ce qu’ignore la majorité…
    JB : Pour ce qui est de la majorité, je suis d’accord. Mais pour les militants, les opposants ou les journalistes, cela fait un bon moment que c’est intégré.
    Quand je tweete, je le fais sous mon nom parce que je suis en France. En revanche, mes clients basés dans des pays dangereux le font sous des pseudonymes avec des VPN [réseau virtuel privé qui protège notamment contre l’espionnage et la censure] très compliqués. Je ne dis pas que c’est parfait, mais il y a eu une prise de conscience.
    MEE : Parmi les pays très surveillés par le Maroc, l’Algérie. La question du Sahara occidental est-elle la raison principale de cette surveillance ?
    JB : Il y a, d’abord, cette rivalité quasi historique entre les deux pays pour savoir qui va avoir le pouvoir sur le nord de l’Afrique, pour résumer. Ensuite, cette question du Sahara occidental qui est le cœur de la machine diplomatique du Maroc. On ne peut pas comprendre la diplomatie marocaine si l’on ne comprend pas que ce pays veut asseoir sa légitimité sur cette région.
    MEE : Le Maroc semble prêt à tout pour consolider la reconnaissance de la « marocanité » du Sahara occidental par Donald Trump en décembre 2020 en échange de la normalisation des relations avec Israël. Nous l’avons vu avec l’épisode des migrants marocains, dont des mineurs, à Ceuta en mai dernier, le Maroc ayant souhaité faire payer à l’Espagne l’hospitalisation de Brahim Ghali, chef du Front Polisario, pour des raisons humanitaires.
    JB : Absolument. Ils ont quitté l’Union africaine à cause du Sahara occidental puis y sont revenus pour les mêmes raisons. Ils se sont rapprochés d’Israël, avec la normalisation, pour ce même motif et certainement pour NSO…
    Si l’on observe tous leurs mouvements diplomatiques, on s’aperçoit que le Sahara occidental est le cœur de leur politique étrangère.
    Qui sont leurs adversaires sur ce sujet ? On a la Mauritanie qui tente de ménager la chèvre et le chou, mais surtout l’Algérie, base arrière du Front Polisario et de la RASD. Sans l’Algérie, le territoire non colonisé du Sahara occidental serait inexistant. Ces composantes expliquent la surveillance massive de l’Algérie par le Maroc.
    MEE : Vous avez annoncé déposer plainte. À la lumière de notre discussion, j’imagine que vous n’en attendez rien ?
    JB : Au contraire. J’ai déposé ce que l’on appelle une communication devant le comité contre la torture des Nations unies. Il me semble que Claude Mangin et moi-même avons été espionnés en qualité de défenseurs de Nâama Asfari. J’espère que le comité va se saisir de cette affaire. Il a déjà condamné le Maroc par rapport à Asfari, et Claude Mangin subit des représailles du fait de la saisine de ce comité.
    Le Maroc ne répond plus au comité depuis un certain temps, ce qui met à mal ses relations avec les Nations unies. Il est assimilé à un État de quatrième zone dont on a bien compris que c’était une dictature.
    Ensuite, une plainte au pénal est prévue. Sur ces questions-là, le parquet est semi indépendant mais les juges le sont, eux, complètement.
    MEE : Vous craignez pour votre sécurité ?
    JB : Non.
    MEE : Que répondez-vous à ceux qui dénoncent un Maroc « bashing » depuis l’éclatement de l’affaire ?
    JB : Je suis d’accord, les journalistes stigmatisent le comportement du Maroc. La question est de savoir s’ils sont dans l’excès ou non. Selon le côté où l’on est, la perception change forcément. Pour savoir si c’est un acharnement gratuit ou non, il faut vérifier si Pegasus repose sur des mensonges ou des faits réels. Je n’ai pas de preuve qu’Abdellatif Hammouchi ait donné l’ordre de m’écouter.
    Mais parmi les pays utilisateurs, cela pourrait être le Maroc, l’Arabie saoudite ou les Émirats arabes unis. Parmi les articles sortis, les journalistes pointent la DGST [Direction générale de la surveillance du territoire, les renseignements marocains] plutôt que la DGED [Direction générale des études et de la documentation, créée en 1973. En charge du renseignement et du contre-espionnage, elle opère à l’extérieur du Maroc, contrairement à la DGST, tournée vers la surveillance du royaume. Rebaptisée en 2013, la DGST a succédé à la DST, Direction de la surveillance du territoire].
    Si, en ce qui me concerne, on peut envisager qu’il y ait un doute, qu’en est-il de Claude Mangin ? Qui pourrait imaginer que l’Arabie saoudite s’intéresse aux activités de madame Mangin tout comme à celles d’Oubi Bouchraya, diplomate sahraoui ?
    Concernant Philippe Bouyssou, maire d’Ivry-sur-Seine, les tentatives d’écoute de cet élu suivent les incidents qui ont eu lieu lors d’un conseil municipal [le 30 juin] perturbé par des représentants marocains. Qui a intérêt à écouter [ces élus] ?
    Peut-on dire que les journalistes s’acharnent ? Si l’on considère qu’un État ami de la France peut, sans que cela ne nécessite de discussions, espionner le président français et ses citoyens, alors oui, ils abusent. Si non, alors ils ne s’acharnent pas. Ils informent.
    MEE : Pour finir, on sent certains Franco-Marocains pris dans un conflit de loyauté vis-à-vis de leur pays d’origine. Quel rôle peuvent-ils jouer pour apaiser la situation ?
    JB : Je pense qu’il n’y a pas une diaspora mais plusieurs. Certains sont embrigadés, pris dans un affect, et se refusent à accepter le sens de ces révélations. Mais je suis un optimiste et j’espère que la majorité regardera les faits en face sans hurler avec les loups.
    Cependant, tous les harcèlements que j’ai reçus proviennent de citoyens franco-marocains ou marocains. Pour moi, tout cela montre une certaine faillite de l’éducation française fondée sur le rationalisme. On voit bien que l’on est sorti de ce cadre. Voyez les débats sur la vaccination. Plus personne n’arrive à être audible en posant le débat de manière rationnelle.
    Middle East Eye, 29/07/2021
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  • Espionnage du Maroc : Benny Gantz en opération de déminage à Paris

    Pegasus. L’artisan de la cyberarmée israélienne en opération déminage à Paris


    Lina Sankari
    Après la révélation du ciblage du téléphone d’Emmanuel Macron par le Maroc grâce à une technologie israélienne, le ministre israélien de la Défense, Benny Gantz, rencontrait mercredi son homologue française, Florence Parly.
    La diplomatie peut parfois représenter un exercice de contorsion. En visite à Paris mercredi, le ministre israélien de la Défense a tenté de préserver la relation bilatérale. Il a ainsi communiqué à son homologue française, Florence Parly, les premiers éléments de l’enquête lancée par son pays après les révélations du consortium international de journalistes Forbidden Stories autour du système d’espionnage mondial développé par la société israélienne NSO. Au même titre qu’une arme, l’exportation du logiciel malveillant Pegasus vers des États tiers doit faire l’objet d’une validation de l’Agence de contrôle des exportations militaires, qui dépend du ministère israélien de la Défense. Benny Gantz, dont le pays a mis en place une commission d’enquête parlementaire, a ainsi expliqué qu’Israël considérait les allégations de surveillance de masse avec « le plus grand sérieux », arguant que son ministère approuvait les exportations de cybertechnologies «  uniquement pour être utilisées contre le terrorisme et le crime ».
    Des contrats signés par Israël au gré de ses alliances

    Reste à savoir comment le président Macron et quinze ministres français se sont retrouvés sur la liste des personnalités ciblées potentiellement par le Maroc, client de NSO. Lors de sa rencontre avec Florence Parly, Benny Gantz a déclaré que l’entreprise avait enfreint les règles sur les licences. Un argument qui n’enlève rien au fait qu’Israël a monnayé et validé ces contrats au gré de ses alliances et de ses ambitions géopolitiques, notamment en se rapprochant de régimes autoritaires. Des responsables du ministère israélien de la Défense chargés de superviser les exportations commerciales de technologies de cybersurveillance ont inspecté le siège de l’entreprise « pour vérifier les rapports et les réclamations soulevés à son sujet », selon un communiqué officiel. Ou peut-être débusquer un éventuel lanceur d’alerte. 
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  • Espionnage: Macron demande des comptes au Maroc

    Maroc, Emmanuel Macron, Pegasus, espionnage, logiciels espions,

    ESPIONNÉ LUI ET 15 MEMBRES DE SON GOUVERNEMENT VIA PEGASUS : Macron demande des comptes à M6

    Le Maroc a cru bon de faire en appelant Israël à la rescousse au lendemain de la révélation du scandale planétaire Pegasus. Mais la tentative est vaine car les premiers contrecoups de l’opération d’espionnage à grande échelle commencent à lui sauter à la figure. De la part même de ses alliés traditionnels, la France, dont le président Macron, lui-même et quinze de ses ministres, ont été mis sous surveillance via le logiciel espion israélien.

    Annoncé en visite à Rabat, le MAE israélien, Yair Lapid, tentera diplomatiquement d’apaiser les tensions. Seulement, l’entreprise n’est pas tant de cet ordre, puisqu’elle franchit les lignes rouges pour tout ce qu’elle porte comme préjudice à la sécurité et à la souveraineté des États, dont les téléphones de hauts responsables ont été ciblés par l’espionnage du Makhzen. On voit mal en effet comment l’entité sioniste, à l’origine même de la conception du logiciel espion appartenant à NSO Group, pourrait faire sortir d’affaire les services du Makhzen de Hammouchi alors qu’elle-même est impliquée !

    Après s’être imposé un silence durant la semaine qui suivi les révélations du consortium de journalistes en collaboration avec une quinzaine de rédactions internationales et l’ONG Amnesty, comme pour accorder une sorte de bénéficie du doute au Maroc, le président Français, Emmanuel Macron, a rompu le silence mercredi dernier. L’Élysée ne peut plus se suffire de : « Si les faits sont avérés, ils sont très graves », surtout que d’autres révélations plus poussées, pour ne citer que celles du quotidien « Le Monde », ont démontré par des preuves matérielles et techniques l’opération d’espionnage du Makhzen.

    Ainsi, rapporte le journal français dans son édition de jeudi, le président de la République, lors du dernier Conseil des ministres auquel il participait en visioconférence depuis son avion au retour d’un déplacement en Polynésie, a déclaré avoir demandé des comptes au Maroc et à Israël. « J’ai demandé des explications au Maroc et à Israël », cite « Le Monde » qui avance ses propres informations.

    Si maintenant le gouvernement français a beaucoup échangé avec son homologue israélien au sujet de l’affaire Pegasus, dont le séjour du ministre de la Défense israélien Benny Gantz en France et sa rencontre fort médiatisée avec son homologue Florence Parly peut attester de ce fait, il n’a pas fait pareil avec les autorités marocaines, du moins pas publiquement. C’est ce que précise le même quotidien. « Si l’entretien téléphonique d’Emmanuel Macron avec le premier ministre israélien, Naftali Bennett, a été confirmé de source officielle, l’Élysée se refuse à tout commentaire en ce qui concerne un échange avec les autorités marocaines ».

    En tout cas, il y a fort à croire que s’il reste bavard au sujet de cette affaire, Macron n’entend pas fermer les yeux sur une opération d’espionnage d’État qui l’ait visé lui-même et une quinzaine de ministres de son gouvernement. Pour ce qui est des services israéliens, on sait que les loups ne se mangent pas entre eux, mais s’il est avéré, du point de vue de la France, qu’ils étaient les commanditaires, le Makhzen sera le premier fusible à sauter.
    Farid Guellil

    Le Courrier d’Algérie, 31/07/2021

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  • Maroc-Sahara Occidental : L’exigence de la légalité

    Les dernières illusions de l’occupant marocain volent en éclats. Pris en flagrant délit d’espionnage international, en sous-traitant de l’alliée sioniste, le Makhzen est confronté à un désaveu cinglant prononcé par l’Allemagne, coupable du respect de la légalité internationale, et l’Europe condamnant fermement le recours au chantage immoral exercé contre l’Espagne voisine menacée d’un afflux massif de jeunes migrants Marocains illégaux.

    Le retour aux réalités est dur pour l’Etat narcotique qui voit fondre comme neige au soleil le processus de normalisation destiné à enterrer la cause palestinienne et sahraouie. Près de 6 mois après la signature des accords dits d’Abraham, l’exigence de légalité est au cœur de la perception de la nouvelle administration américaine signant la mort de la prétendue souveraineté marocaine sur le Sahara occidental conforté dans son statut de territoire non autonome et son droit à l’autodétermination défendu par 28 sénateurs à égalité entre démocrates et républicains.
    En janvier, le secrétaire d’Etat Antony Blinken a déjà amorcé un changement d’approche, en affirmant la nécessité d’un «examen attentif» de certaines dispositions liées à la normalisation des relations des pays arabes avec l’entité sioniste. L’étau se resserre sur une monarchie aux abois suspendue au parapluie sioniste et aux mirages d’un expansionnisme porteur de risque de déflagration et d’une instabilité dans la région.
    Cette dérive interpelle grandement les alliés traditionnels trahis par une ingérence flagrante dans leurs affaires intérieures, sous l’effet de la guerre cybernétique ciblant les journalistes, les membres de la société civile, des personnalités politiques et même des dirigeants en exercice. Il reste à s’interroger sur la riposte à une violation systématique des valeurs fondamentales et de la liberté d’expression dont sont friands le Parlement européen et des médias de la complaisance avec «Notre ami le roi» et son héritier indélicat et indigne.
    La position claire de l’administration Biden a remis sur les rails le processus de règlement du conflit maroco-sahraoui. «Nous voulons voir un processus dirigé par l’ONU qui aboutit à un accord acceptable par toutes les parties et qui mène à la paix et à la stabilité», a souligné le secrétaire d’Etat adjoint aux affaires du Proche Orient, Joey Hood, en visite en Algérie. «C’est ce qu’il y de mieux à faire et c’est l’approche à laquelle nous allons consacrer tout notre temps, notre énergie et tous nos efforts», a-t-il précisé.
    Cette dynamique prometteuse exige la nomination, au plus vite, d’un nouvel émissaire personnel du secrétaire général bloqué dans sa démarche par l’intransigeance marocaine. Elle reste la voie la plus sûre pour un retour fortement attendu à la table des négociations.
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  • NSO Group :Quelqu’un doit faire le sale boulot

    Quelqu’un doit faire le sale boulot : Les fondateurs de NSO défendent le logiciel espion qu’ils ont créé.

    Le PDG Shalev Hulio a déclaré qu’il  » fermerait Pegasus  » s’il existait une meilleure alternative. Dans de longues interviews, Hulio et le cofondateur Omri Lavie ont retracé un parcours lancé depuis un kibboutz israélien et ont affirmé que la technologie de l’entreprise avait sauvé des vies.

    « Si quelqu’un dit : j’ai trouvé un meilleur moyen d’attraper des criminels, des terroristes, d’obtenir des informations d’un pédophile, je fermerai cette entreprise », a récemment déclaré Shalev Hulio, cofondateur et PDG de NSO Group. « Je fermerai complètement Pegasus. » (Jonathan Bloom)

    Par Elizabeth Dwoskin et Shira Rubin

    Deux entrepreneurs israéliens d’une vingtaine d’années, qui dirigeaient une petite start-up de services à la clientèle pour les téléphones portables, assistaient à une réunion avec un client en Europe en 2009 lorsqu’ils ont reçu la visite de représentants des forces de l’ordre.

    Le premier réflexe des entrepreneurs a été la peur. Peut-être avaient-ils fait quelque chose de mal dont ils n’étaient pas conscients, se souviennent Shalev Hulio et Omri Lavie dans des entretiens accordés cette semaine au Washington Post.

    Au lieu de cela, les fonctionnaires ont fait une demande inattendue. Les agents ont déclaré que la technologie des Israéliens, qui aidait les opérateurs à dépanner les smartphones de leurs clients en leur envoyant un lien SMS permettant à l’opérateur d’accéder au téléphone à distance, pourrait être utile pour sauver des vies. Les méthodes traditionnelles d’écoute téléphonique devenaient obsolètes à l’ère du smartphone, ont expliqué les agents, car les premiers logiciels de cryptage bloquaient leur capacité à lire et à écouter les conversations des terroristes, des pédophiles et autres criminels. Hulio et Lavie seraient-ils en mesure de les aider, en construisant une version de leur technologie que les fonctionnaires pourraient utiliser ?

    Plus de dix ans plus tard, la société de cybersécurité née de cette conversation fatidique – NSO Group, un acronyme basé sur les prénoms des trois fondateurs – est au centre d’un débat mondial sur l’armement d’une technologie de surveillance puissante et largement non réglementée.

    Cette semaine, le Washington Post et un consortium de 16 autres médias partenaires ont rapporté que le logiciel espion de qualité militaire de l’entreprise avait été utilisé pour tenter et réussir le piratage de 37 smartphones appartenant à des journalistes, des chefs d’entreprise et deux femmes proches du journaliste saoudien assassiné Jamal Khashoggi.

    Le parcours de Hulio – raconté au Post dans des entretiens avec des amis, des investisseurs, des collègues et Hulio lui-même – a été salué au fil des ans comme une version israélienne d’une success story de la Silicon Valley, une vitrine brillante du potentiel d’une minuscule nation qui se targue d’avoir la plus forte concentration de start-ups par habitant au monde, selon Startup Genome, un groupe de recherche basé à San Francisco. Mais NSO montre également le côté plus troublant de cette histoire, selon certains experts – l’histoire d’un pays trop désireux de se faire des amis dans une région hostile et trop disposé à prendre des mesures controversées au nom de la survie, ainsi que les limites des capacités des entreprises technologiques à contrôler l’abus de leurs produits par leurs clients.

    M. Hulio a reconnu que certains clients gouvernementaux de NSO avaient abusé de ses logiciels par le passé – décrivant cela comme une « violation de la confiance » – et a déclaré que NSO avait coupé l’accès de cinq clients au cours des dernières années après avoir mené un audit sur les droits de l’homme, et avait mis fin aux liens avec deux d’entre eux au cours de la seule année dernière. M. Hulio a déclaré qu’il était lié par des accords de confidentialité stricts avec les organismes d’application de la loi qui lui interdisent de nommer des clients ou de décrire leurs activités. Il a ajouté qu’il ne pouvait pas nommer le pays ou l’agence qui l’avait initialement approché en Europe, car il est devenu par la suite un client.

    Toutefois, deux personnes connaissant bien les activités de la société ont déclaré que les clients suspendus étaient l’Arabie saoudite, Dubaï (Émirats arabes unis) et certaines agences publiques au Mexique. L’une des personnes a déclaré que la décision de l’Arabie saoudite était une réponse au meurtre de Khashoggi, et deux autres ont dit que les agences mexicaines continuaient à utiliser un autre produit de NSO conçu pour aider les premiers intervenants dans les missions de recherche et de sauvetage.

    « Il y a une chose que je veux dire : Nous avons construit cette entreprise pour sauver des vies. Un point c’est tout », a déclaré Hulio lors d’une interview tard dans la nuit de lundi à mardi, à un étage élevé de la tour de bureaux non identifiée de la société, située dans la banlieue chic de Tel Aviv, à Herzliya. « Je pense qu’il n’y a pas assez d’éducation sur ce qu’une organisation de sécurité nationale ou de renseignement doit faire chaque jour afin de donner, vous savez, une sécurité de base à leurs citoyens. Et tout ce que nous entendons, c’est cette campagne selon laquelle nous violons les droits de l’homme, et c’est très contrariant. Parce que je sais combien de vies ont été sauvées dans le monde grâce à notre technologie. Mais je ne peux pas en parler ».

    Interrogé sur les 37 piratages tentés et confirmés, il a déclaré : « Si même un seul est vrai, c’est quelque chose que nous ne supporterons pas en tant qu’entreprise ». Les téléphones figuraient sur une liste de plus de 50 000 numéros concentrés dans des pays connus pour la surveillance de leurs citoyens et également connus pour avoir été clients de NSO Group, selon l’enquête du consortium. M. Hulio a déclaré que la société poursuivait son enquête sur les numéros fournis par les médias et que les affirmations concernant un quelconque lien entre la liste et NSO étaient fausses.

    Dans les premières semaines qui ont suivi la création de la société, en 2010, « avant même d’avoir écrit une ligne de code », Hulio a déclaré que lui et Lavie avaient établi trois principes directeurs qui restent en vigueur aujourd’hui. Premièrement, ils ne concéderaient des licences qu’à certaines entités gouvernementales, reconnaissant que la technologie pourrait être utilisée de manière abusive dans des mains privées. Deuxièmement, ils n’auraient aucune visibilité sur les individus ciblés par les clients après leur avoir vendu une licence logicielle. La troisième, qui selon Hulio était la plus importante, était de demander l’approbation de l’unité de contrôle des exportations du ministère israélien de la Défense, une décision inhabituelle car à l’époque, l’unité ne réglementait que les ventes d’armes à l’étranger (Israël a promulgué une loi sur la cybernétique en 2017).

    Ces trois décisions ont été prises, selon Lavie, pour que « nous puissions dormir la nuit ». Il a dit que lui et Hulio croyaient fermement qu’il n’était pas approprié d’avoir une connaissance directe des questions de sécurité nationale interne des pays étrangers. Ils pensaient également qu’ils n’étaient pas équipés pour prendre des décisions politiques sur les clients à qui vendre.

    NSO demande également à ses clients de signer un accord dans lequel ils promettent de n’utiliser le logiciel qu’à des fins d’application de la loi ou de lutte contre le terrorisme.

    Ces derniers jours, certains dirigeants politiques israéliens ont commencé à faire valoir que les règles de contrôle des exportations qui régissent les entreprises de cybertechnologie étaient peut-être devenues trop sujettes à l’influence politique. Certains des pays où NSO avait des accords, notamment l’Arabie saoudite et les EAU, sont des endroits où le dernier Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a cherché à forger de nouvelles alliances.

    La version de la Silicon Valley de Hulio et Lavie commence dans un poulailler rénové dans un kibboutz du centre d’Israël. Onze ans plus tard, NSO est une entreprise de 750 employés, évaluée par les investisseurs à plus de 1,5 milliard de dollars.

    Hulio – décrit par ses amis comme un optimiste acharné et un charismatique sans prétention – a posé pour des photos tenant une figurine de Superman qu’il gardait dans son bureau à côté d’autres figurines et de statuettes du premier ministre israélien. À 39 ans, il sert dans la réserve militaire israélienne, où il s’est porté volontaire pour de nombreuses missions de recherche et de sauvetage, notamment lors du tremblement de terre de 2010 en Haïti.

    Hulio et Lavie étaient les meilleurs amis du lycée, inséparables après s’être rencontrés lors d’un voyage scolaire en Europe où ils ont visité les sites d’anciens camps de concentration. Lavie était axé sur les affaires, tandis que Hulio était un enfant du théâtre. Tous deux étaient des férus d’informatique, passant des heures dans des salons de discussion en ligne et jouant à des jeux vidéo dans la ville portuaire à revenu moyen de Haïfa, disent-ils. Les amis sont entrés dans l’armée après le lycée, comme c’est le cas pour la majorité des citoyens israéliens, mais ont servi dans des rôles non techniques.

    « Ils n’avaient pas le parcours de l’entrepreneur israélien typique », a déclaré Eddy Shalev, le premier investisseur de la société. « Ils ne venaient pas de l’intelligence, ni de l’argent. Ils n’étaient pas du tout des informaticiens. Mais il [Hulio] avait le charisme d’un véritable entrepreneur. »

    Après l’armée, Hulio était en fac de droit quand lui et Lavie ont eu l’idée de créer un logiciel qui permettrait aux gens d’acheter les produits qu’ils voyaient dans les émissions de télévision. L’entreprise, MediAnd, s’est retrouvée à court d’argent lors du krach boursier de 2008. Dépité et sans emploi, Lavie a commencé à vendre des téléphones Nokia et des BlackBerrys dans un kiosque de centre commercial. Les deux hommes se sont sentis frustrés par la difficulté pour les opérateurs d’effectuer des mises à jour de base sur les appareils mobiles. Ils ont décidé de cofonder la société de service clientèle mobile CommuniTake, ainsi nommée parce qu’elle prenait le contrôle des téléphones des gens avec l’autorisation du client.

    Après la réunion impromptue avec les forces de l’ordre en Europe, Lavie a déclaré que Hulio et lui étaient « stupéfaits » par la rapidité avec laquelle le rythme de la technologie et l’avènement des smartphones avaient permis aux criminels d’échapper aux forces de l’ordre.

    Ils sont allés directement au conseil d’administration de CommuniTake et ont déclaré qu’ils voulaient changer la direction de l’entreprise. Selon eux, le conseil d’administration s’est moqué de l’idée de faire un changement aussi radical et difficile alors que CommuniTake montrait déjà des signes de succès.

    Quelques mois plus tard, Hulio participait à une mission bénévole de recherche et de sauvetage en Haïti, où il retirait des corps des décombres d’une université effondrée.

    « J’ai pensé, vous savez, si vous avez quelque chose qui peut sauver des vies, pourquoi ne pas le faire ? C’est le moment ou jamais », a-t-il déclaré.

    Il a persuadé Lavie de le rejoindre, et les entrepreneurs ont quitté CommuniTake après avoir tenté en vain de persuader le conseil d’administration de changer de cap.

    Mais Hulio dit qu’il s’est vite rendu compte qu’il n’avait aucune idée de la faisabilité technologique de son objectif : créer un logiciel permettant aux forces de l’ordre de prendre le contrôle d’un téléphone portable.

    Un jour, lui et Lavie ont entamé une conversation dans un café avec deux inconnus qu’il avait entendus parler de la façon d’accéder à distance à des téléphones, ont-ils dit. Les inconnus ont dit qu’ils avaient un ami, un ingénieur qui travaillait dans une branche locale de Texas Instruments, qui pouvait construire le logiciel envisagé par Hulio. Les inconnus ont appelé l’ingénieur, et Hulio lui a offert un emploi sur-le-champ, lui promettant une augmentation de salaire considérable, bien qu’à l’époque il n’avait pas d’investisseurs. (Eddy Shalev et quelques autres ont rapidement consacré 1,5 million de dollars à l’entreprise).

    NSO a obtenu son premier bureau – le poulailler rénové. Environ sept mois plus tard, ils ont fait la démonstration d’une première version du produit et l’année suivante, ils ont décroché leur premier client, le Mexique, selon une personne connaissant bien la société et un rapport des médias israéliens. Ils ont appelé le logiciel espion Pégase, d’après le cheval ailé de la mythologie grecque, parce que Hulio a dit que le logiciel était comme un cheval de Troie envoyé par les airs vers les téléphones des gens. (Le troisième fondateur de l’acronyme NSO, Niv Carmi, est parti peu après).

    Le matin de Noël de cette même année, le président du Mexique a appelé NSO pour la remercier du « plus grand cadeau de Noël que vous puissiez offrir au peuple mexicain », à savoir l’arrestation d’un grand criminel, selon deux employés au courant de la conversation qui ont parlé sous le couvert de l’anonymat parce qu’ils ne sont pas autorisés à en parler publiquement.

    Deux personnes familières avec les transactions de l’entreprise ont déclaré que le logiciel espion de NSO avait aidé à deux reprises le Mexique à capturer le baron de la drogue Joaquín « El Chapo » Guzmán, d’abord en 2014, puis en 2016. Un rapport de 2019 du journal israélien Yedioth Ahronoth a rapporté la même affirmation ; le Post n’a pas confirmé de manière indépendante un rôle de NSO dans la capture d’El Chapo.

    Après cela, Lavie – qui est toujours membre du conseil d’administration et a depuis fondé une autre cyber start-up – a commencé un effort de plusieurs années pour trouver le nom de fixeurs bien connectés qui travaillent avec des agences de renseignement dans le monde entier.

    Très vite, la société a doublé sa clientèle chaque année, a déclaré l’un des premiers employés. Il a dit que parfois les clients montraient leurs remerciements en envoyant un article de presse sur l’arrestation d’une figure criminelle – sans référence à un quelconque rôle furtif joué par NSO dans l’arrestation – une expérience qui, selon lui, ressemblait à de la « magie ».

    L’employé a déclaré que Hulio est obsessionnellement persistant mais réaliste. « Si 50 personnes lui disent que quelque chose n’est pas possible, il continuera à chercher jusqu’à ce qu’il trouve la personne qui peut le faire. Mais ensuite, si la personne dit qu’elle peut le faire, il dira : « Comment se fait-il que vous puissiez faire quelque chose alors que 50 personnes avant vous ont dit que ce n’était pas possible ? Prouvez-le. »

    Au fur et à mesure que NSO se développait, l’entreprise a été couverte de récompenses par les meilleures institutions académiques israéliennes. En 2018, une émission à potins a couvert la retraite d’entreprise tous frais payés de NSO en Thaïlande ; Hulio avait fait venir par avion certaines des plus grandes célébrités israéliennes pour l’occasion.

    Mais même avant les controverses croissantes de NSO, certaines personnes de la communauté technologique israélienne très soudée ont déclaré qu’elles pensaient que les activités de NSO étaient contraires à l’éthique et ont dit qu’elles évitaient ce que l’on appelle la « cyber-offensive », se concentrant plutôt sur la technologie qui aide les victimes à se défendre contre les attaques.

    Ces jours-ci, Hulio vit de peu de sommeil, de coca light et de sushis à emporter, et tente de s’expliquer sans grand espoir que le monde l’écoute.

    Il oscille entre contrition et défensive : Il dit croire que des intérêts hostiles à Israël sont à l’origine de certaines des attaques contre sa société et d’autres cyberentreprises israéliennes. Il note que les États-Unis vendent depuis des années du matériel militaire à l’Arabie saoudite, un pays avec lequel NSO a été identifié comme ayant travaillé.

    Dans le même temps, M. Hulio a déclaré que l’entreprise continuerait à fermer immédiatement tout client ayant « violé la confiance » et a refusé de vendre à 90 pays, dont la Russie et la Chine. NSO a commencé à demander à ses clients de signer un engagement en matière de droits de l’homme en 2020, et le mois dernier, elle a publié son premier rapport de transparence.

    Mais la capacité de NSO à enquêter est aussi fondamentalement entravée par sa politique de n’avoir aucune visibilité sur les activités des clients.

    Si elle apprend ou soupçonne qu’un client a enfreint ses règles, elle peut actionner un interrupteur qui coupe l’accès à Pegasus. Elle a les moyens techniques d’identifier les numéros de téléphone qui ont été ciblés par son logiciel, mais seulement si le client ou une personne extérieure, comme un dénonciateur ou une organisation de presse, fournit les numéros et que le client donne la permission d’accéder à son système.

    La situation serait meilleure, selon M. Hulio, si le secteur de la cybersécurité était réglementé par un organisme mondial. Plus important encore, a-t-il ajouté, le gouvernement israélien a un rôle à jouer : Les pays qui ne respectent pas leurs accords devraient se voir interdire l’accès à la cybertechnologie israélienne.

    Et il insiste sur le fait que ce que NSO a construit est toujours pour le bien de tous.

    « Si quelqu’un dit : j’ai trouvé un meilleur moyen de coincer des criminels, des terroristes, d’obtenir des informations d’un pédophile, je fermerai cette société », a-t-il déclaré. « Je fermerai Pegasus complètement. »

    Lavie l’a exprimé en termes encore plus durs.

    « C’est horrible », a-t-il dit à propos des rapports sur les attaques contre les journalistes et autres abus. « Je ne le minimise pas. Mais c’est le prix à payer pour faire des affaires. … Cette technologie a été utilisée pour gérer littéralement le pire de ce que cette planète peut offrir. Quelqu’un doit faire le sale boulot ».

    Le projet Pegasus est une enquête collaborative qui implique plus de 80 journalistes de 17 organismes de presse, coordonnée par Forbidden Stories avec le soutien technique du Security Lab d’Amnesty International. Plus d’informations sur ce projet.

    The Washington Post, 21/07/2021

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  • Affaire Pegasus : L’Algérie a-t-elle piégé le Maroc ?

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    Bien avant l’éclosion du scandale d’espionnage marocain à travers le logiciel israélien Pegasus, des officiels algériens en avaient parlé aux médias locaux, notamment le porte-parole du gouvernement et ministre de la Communication, Ammar Belhimer.

    Lors d’une journée d’étude organisée le 8 février 2021 par l’armée algérienne sur «la cybercriminalité et ses répercussions sur la sécurité nationale et celle du citoyen», M. Belhimer a affirmé que l’Algérie est ciblée par des parties étrangères à travers une guerre électronique structurée, soulignant que la cybercriminalité est devenue une réalité inquiétante qui n’est pas une résultante du progrès technologique mais une dérive du mésusage de ces innovations techniques.

    Quelques jours plus tard, le 15 février plus précisément, Belhimer apportait plus de détails dans une interview accordée au journal Echourouk dans laquelle « il a révélé, avec des chiffres et des indicateurs, les faits de guerre électronique contre l’institution, et les recherches militaires menées par l’entité sioniste dans les logiciels offensifs et ses applications civiles dans le cyberespace, qui sont vendus aux pays qui souhaitent espionner leurs citoyens ainsi que les pays en conflit, au premier rang desquels se trouve le Maroc ».

    Belhimer a indiqué que « la recherche militaire menée par l’entité sioniste et ses applications civiles est le matériau qui alimente généreusement les entreprises opérant dans le cyberespace ». « L’ONS a mené l’attaque à l’aide d’un logiciel espion, appelé Pegasus, qui a été accessoirement utilisé contre des défenseurs des droits humains, des avocats, des chefs religieux, des journalistes et des travailleurs humanitaires », a-t-il ajouté.

    « Le NSO a également accordé une licence d’utilisation de ce programme à des dizaines de gouvernements, en particulier des régimes qui ne jouissent pas d’une bonne réputation dans le domaine du respect des droits de l’homme, comme le Maroc», a-t-il signalé.

    Les autorités algériennes étaient-elles au parfum du scandale qui allait exploser cinq mois après ? En tout cas, malgré les dimensions de leur espionnage dans le pays voisin de l’Est, les services secrets marocains n’ont pas prévu la démission du président Abdelaziz Bouteflika. Pire encore, des médias proches du palais, tels que Le360, ont fait le ridicule en annonçant la mort du président Tebboune et en parlant de coup d’Etat organisé par le général Saïd Changriha.

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  • Affaire Pegasus: Personne n’évoque la responsabilité d’Israël

    Questionnée par un journaliste, Eri Kaneko, Porte-parole associée de M.  António Guterres, Secrétaire général de l’ONU, a evité d’évoquer la responsabilité de l’Etat d’Israël dans le scandale d’espionnage massif connu sous le nom d’affaire Pegasus

    Question : Ma question sur ce système d’espionnage Pegasus. Tout le monde concentre ses critiques sur le système lui-même et peut-être sur l’entreprise, mais personne ne parle du pays qui est derrière, c’est-à-dire Israël. Israël agit comme un État voyou dans ce… dans cette affaire. Pourquoi personne ne pointe du doigt l’État qui parraine ces activités perverses à travers le monde ?

    Porte-parole associé : Je veux dire, je pense que la cybersécurité est un problème qui concerne chaque pays. Nous avons vu le piratage de divers acteurs et divers… personnes pointer du doigt partout. Ce n’est pas le seul cas. C’est déjà arrivé. Cela continue et nous nous attendons à le voir à l’avenir aussi, je pense.

    Ce qu’il est important de dire, c’est que le Secrétaire général a parlé de la nécessité d’un cadre de réglementation plus rapide et plus flexible pour ces types de technologies et de la manière dont les pays doivent se réunir pour décider de certaines limites. Donc, je pense que l’important est de se concentrer sur la façon dont les gouvernements, les entreprises et la société civile peuvent établir ces protocoles pour définir ensemble les meilleures pratiques. Et le Secrétaire général a été très clair sur le fait que nous avons besoin d’une meilleure gouvernance sur ce type de pratiques.

    Question : Mais quand la Russie le fait, les gens pointent du doigt la Russie. Quand la Chine le fait, aussi, ils mentionnent la Chine. Quand l’Angleterre a mis sur écoute le Bureau du Secrétaire général, on a dit tout à fait que c’était l’Angleterre. Pourquoi maintenant, dans ce cas, Israël manque-t-il ?

    Porte-parole associé : Je ne sais pas si vous avez lu des rapports, mais je vais simplement vous indiquer tous les rapports des médias où les faits sont exposés… [dialogue croisé]

    Question : Oui, je suis les médias… [dialogue croisé]

    Porte-parole associé : C’est tout le commentaire que nous avons à ce sujet. Je pense que le rapport Pegasus est très clair à ce sujet, et nous allons le laisser parler de lui-même.

    Oui, dans la pièce ici.

    Question : Merci beaucoup. J’ai un petit suivi à ce sujet. Le personnel de l’ONU ou les services pertinents de l’ONU ont-ils pris des mesures de sécurité supplémentaires après cette histoire avec Pegasus ?

    Porte-parole associé : Oui, je veux dire, je pense – et Farhan en a parlé hier – que nous prenons toutes les mesures pour nous assurer que nos communications sont sécurisées. Et, évidemment, comme je l’ai dit, ce n’est pas la première fois que quelque chose comme ça arrive, et ce ne sera pas la dernière, et nous faisons tout notre possible pour sécuriser nos communications.

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