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  • France-Algérie : Le jeu de Macron

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    Après ses provocations envers l’Algérie en allant jusqu’à remettre l’histoire d’une Nation pour légitimer indirectement la colonisation en Algérie, Macron a prôné, dans un entretien diffusé mardi, un apaisement dans les relations entre Paris et Alger. « Mon souhait, c’est qu’il y ait un apaisement parce que je pense que c’est mieux de se parler et d’avancer. Il y a sans doute des désaccords mais la vie, c’est fait pour parler des désaccords et aussi les partager », a déclaré le chef de l’Etat, dans un entretien accordé lundi soir à France Inter et diffusé mardi matin.

    « Il y aura immanquablement d’autres tensions, mais je pense que mon devoir, c’est d’essayer de faire cheminer ce travail» de mémoire, a-t-il ajouté. Mais, Macron est allé au-delà de la mémoire commune entre l’Algérie et la France, en évoquant la question des «Ottomans» en Algérie. Déjà, cette question des Turcs en Algérie est, avant tout, une affaire algérienne dont le dossier doit être traité par des Historiens et non par des politiques. «Des tensions, il y en aura…».

    C’est comme si l’Histoire allait déranger les politiques. Or, depuis l’événement du malaise Zeroual-Chirac, il n’y a pas eu de tension entre l’Algérie et la France. Déjà, le travail de mémoire est une source d’apaisement et non de tension.

    La « provocation » de Macron était délibérée, d’ailleurs il ne s’est même pas excusé. La France a peur que l’Algérie se rapproche trop de la Chine. Et cette «provocation» viserait, en premier lieu, la Turquie qui s’est rapprochée de la Russie.

    La «provocation» de Macron qui est non pas vers le régime mais vers tout un peuple, est aussi une stratégie électoraliste pour «rassurer» la droite et l’extrême droite en France.

    La meilleure réponse de l’Algérie est de donner la parole et d’ouvrir les espaces aux Historiens afin de traiter les questions d’Histoire et de crimes contre l’humanité durant la période coloniale.

    Le Carrefour d’Algérie

  • Ouest Tribune : Une mémoire honteuse

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    Les dérapages historiques du président français sur la colonisation et l’existence d’une nation algérienne avant l’invasion française rappelle que la nostalgie pour une ère révolue n’est pas une affaire d’extrême droite dans ce pays. Cette célébration du crime contre l’humanité qu’a été la colonisation française en Afrique est donc une affaire d’élite toute tendance idéologique confondue. Il serait injuste de mettre toute l’intelligentsia française dans le même sac, mais disons-le clairement, Emmanuel Macron est dedans sans nuance aucune. Mais ce petit-fils spirituel de Le Pen et les autres affidés de l’Algérie-française est bien embêté tous les 8 mai et les 17 octobre de chaque année. Il ne peut invoquer des faits de guerre, ni une hostilité armée de manifestants. Dans les deux cas, c’est du pur crime d’Etat.

    En cette date anniversaire du 17 octobre 1961 de l’abject assassinat de centaines d’Algériens, souvent de la manière la plus barbare, commis par la police française, les personnalités en vu de l’establishment français n’éprouve pas de honte particulière à se bousculer sur twiter et les chaînes de radio et de télévision pour apostropher les historiens qui disent la vérité et sortir des sornettes sur la prétendue responsabilité algérienne dans la guerre de libération nationale. Comme si l’acte colonial lui-même était, à l’origine, une demande de protection de l’Algérie.

    En cette date-anniversaire, les responsables politiques de l’Hexagone qui protègent leur gagne-pain mémoriel ne savent, en réalité, pas sur quel pied danser.

    L’institutionnalisation de la torture, le déplacement des populations, l’usage du napalm et les bombardements de villages durant la guerre d’Algérie et, plus loin dans l’histoire, les emfumades et les dépossessions des terres des Algériens sont autant de faits historiques. Et tout cela remonte à la surface chaque 17 octobre et 8 mai 45.

    Tout le monde en France, de l’extrême gauche à l’extrême droite en reconnaît la véracité, documents à l’appui. En réalité, personne n’est dupe. Les dernières gesticulations du président Macron n’ont d’autres objectifs que celui de répondre à l’appel des nostalgiques de l’Algérie française.

    Ces derniers, qui faut-il le souligner, perdent du terrain d’année en année et vont droit vers une autre défaite après celle de leur guerre coloniale, ont fait un deal crasseux avec un homme faussement républicain. Dans ce combat d’arrière garde, Macron et consorts ne cherchent pas la vérité historique et encore moins le salut de la République française.

    Par Nabil G.

    Ouest Tribune, 17/10/2021

  • 17 octobre 1961, la manifestation la plus réprimée de l’histoire

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    Qu’il pleuve ou qu’il vente, la ‘’Ville-Lumière’’ ne rompt jamais avec son exercice de prédilection : captiver et tenir en haleine la trentaine/quarantaine de millions de touristes qui, bon an, mal an, déambulent entre les deux rives de la Seine.
    Au rythme des croisières des Bateaux Mouches, la ville des ‘’démons et des anges’’ bat le rappel de tout ce qu’elle compte comme séducteurs pour se raconter et se portraiturer avec cette art de la narration dont elle s’enorgueillit. A tout seigneur, tout honneur, Edith Piaf, Léo Ferré, Charles Aznavour, Jean Ferrat, Claude Nougarou donnent au ballet des Bateaux Mouches des allures d’escapades “lune de miel’’.

    Slalomant entre rive gauche-rive droite, Paris by Seine déroule son ‘’storytelling’’. Les guides touristiques accrédités auprès de l’Office de tourisme de la mégalopole parisienne font œuvre d’histoire et de mémoire. Et tous azimuts. Tout y est. Histoire d’abord : comment, à partir de l’île de la Cité, puis de l’île Saint-Louis, ‘’baris’’ s’est construite et comment, chemin faisant, elle a tissé, sa toile architecturale, une singularité patrimoniale devenue un corpus académique pour les écoles d’architecture du monde entier.

    La ‘’Mecque’’ des touristes en quête d’escapades à multiples facettes raconte tout. Elle ouvre ses pages ‘’Lumières’’ – cafés littéraires, Quartier latin et ses maisons d’édition, Comédie française, Théâtre de l’Odéon, Opéra, Louvre, Institut Pasteur – et ne rechigne pas à étaler ses épisodes sombres : la Commune, Jean Valjean et les Misérables, la famine, la peine capitale, la livraison de Paris au III Reich, l’antisémitisme, le Vél’d’Hiv’, Drancy, ‘’Paris ! Paris outragé ! Paris brisé 1 Paris martyrisé ! mais paris libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France’’, dixit le général de Gaulle.

    Aux touristes venus se détendre et enrichir leur ‘’capital savoir et culture générale’’, Paris raconte tout. Tout ? Pas tout à fait. Le Paris sanglant de la soirée du 17 octobre 1961 brille par son absence dans la narration de la ‘’Ville Lumière’’ et la ‘’capitale des droits de l’homme’’. De la ‘’Journée portée disparue’’, les ‘’guides historiens’’ embarqués par la société ‘’Bateaux Mouches’’ pour éclairer la lanterne des touristes n’en soufflent pas le moindre mot.

    Au rythme des croisières entre le Champ de Mars/Tour Eiffel et d’Austerlitz, la Seine se raconte avec force détails mais se garde d’évoquer les dizaines et dizaines de corps d’Algériens jetés, depuis les ponts de Saint-Michel, Neuilly, Bezons. En témoigne, pour l’Histoire et la postérité, un cliché omniprésent sur la Toile, un graffiti en cinq mots qui, clandestinement, avait bariolé un des quais de la Seine : ‘’Ici, on noie les Algériens’’ ! De Google à Yahoo en passant par AOL et le chinois Baidu, les principaux moteurs de recherche déploient le visuel sous les yeux de l’internaute à la moindre requête ‘’17 octobre 1961’’.

    Soixante ans après les faits, l’autre 17 octobre — ‘’Le 17 octobre des Algériens’’ pour reprendre le titre du livre de Marcel et Paulette Péju – souffre toujours d’une chape de plomb multiforme : médiatique, mémorielle et politique. Il y a soixante ans jour pour jour, par une nuit parisienne pluvieuse, les Algériens de Paris et ses banlieues subissent – dans leur chair — ‘’derniers feux de la folie coloniale’’, selon la formule de Gilles Manceron, l’un des historiens qui, depuis le début des années quatre-vingt-dix, n’en finissent pas de bousculer la chape de plomb qui pèse sur la ‘’journée portée disparue’’. C’était cinq mois avant les accords d’Evian et le cessez-le-feu.

    Le ton martial Papon

    Le 6 octobre 1961, le préfet de police, Maurice Papon, signe un communiqué avec une sémantique au ton martial. Adressé à l’ensemble des rédactions, le texte est rédigé à l’encre de la mise en garde. ‘’Il est conseillé de la façon la plus pressante aux travailleurs algériens de s’abstenir de circuler la nuit dans les rue de Paris et de la banlieue parisienne de 20h30 à 5h30 du matin’’.

    De surcroît, Papon et sa police recommandent ‘’très vivement’’ aux Algériens de ‘’circuler isolément, les petits groupes risquant de paraître suspects aux rondes et patrouilles de police’’. Last but not least, ‘’les débits de boissons tenus et fréquentés par des français musulmans doivent fermer chaque jour à 19 heures’’. Représentée en France par la Fédération de France du FLN (FF-FLN) – la ‘’7eme Wilaya’’, selon la formule imagée de Ali Haroun –, la direction de la révolution ne l’entend pas de cette oreille. ‘’C’est inacceptable’’, réagit-elle à la mesure du couvre-feu. La FF-FLN appelle à manifester dans les rues de Paris.

    Pour avoir lu et relu les documents de la Fédération de France, pour avoir discuté avec nombre de ses responsables, le journaliste et éditeur Renaud de Rochebrune et l’historien Benjamin Stora soulignent à grand trait la motivation de la FF-FLN. La manifestation dans Paris était dirigée ‘’contre cette mesure attentatoire à la liberté fondamentale d’aller et venir, mais surtout discriminatoire et pour tout dire raciste’’.

    Dans leur livre ‘’La guerre d’Algérie vue par les Algériens’’ (Paris, Denoël 2016), de Rochebrune et Stora remettent en perspective la manifestation du 17 octobre 1961 et la revisitent au miroir des manifestations du 11 décembre 1961. ‘’Entre décembre 1960 et octobre 1961, à Alger et à Paris, les +masses algériennes+, comme on disait volontiers à l’époque, vont faire irruption sur le devant de la scène, et +faire+ l’Histoire.

    Dans les deux capitales, de la métropole coloniale et de l’Algérie encore française, ce sont les ouvriers et les étudiants, les sans-droits et les chômeurs qui vont tenter de s’emparer du centre de ces grandes villes d’où ils sont exclus. Prendre possession des espaces citadins, pour les Algériens, ce n’est pas anodin, c’est déjà accéder à une forme de modernité, vouloir peser sur les décisions politiques, utiliser les villes comme des caisses de résonance pour faire valoir sa cause et ses frustrations. Cela marque aussi une date car, alors, la révolution est de retour dans les centres urbains où, sauf exception comme dans le Constantinois en août 1955 puis dans la capitale fin 1956, début 1957, elle était peu présente au début de la guerre et encore moins depuis la fin de la bataille d’Alger’’.

    Des manifestants pacifiques et disciplinés

    La décision de la Fédération de France du FLN d’en appeler à la mobilisation pacifique de la rue a effrayé les autorités. Le ministre de l’Intérieur Roger Frey et le préfet de police décrètent une alerte sécuritaire sans précédent. CRS, gendarmes et policiers des Renseignements généraux se déploient en grand nombre aux portes de Paris, sur les ponts qui traversent la Seine, aux grands carrefours et sur les grandes artères haussmanniennes.

    La FF-FLN fait montre d’un sens remarquable de l’organisation et apporte la preuve qu’elle jouit d’une écoute auprès de l’immigration. Émises via les militants, les instructions de la Fédération de France sont respectées à la lettre. Disciplinés, les manifestants se sont prêtés de bonne grâce aux fouilles des organisateurs FLN.

    Venus des bidonvilles de l’ouest et du nord-ouest parisiens – Nanterre, Levallois, Genvilliers – mais aussi de la Seine-Saint-Denis, les manifestent convergent surtout sur les Grands Boulevards – côté métro Bonne Nouvelle et le cinéma le Grand Rex – avant de marcher vers l’Opéra et traverser la Seine en direction du Quartier latin et du boulevard Saint-Germain. Singularité de cette manifestation – les photos en attestent –, on ne relève ni slogans, ni banderoles, ni drapeaux. Les 20.000 à 30.000 marcheurs – 40.000 à en croire la Fédération de France – manifestent pacifiquement. ‘’L’action de la Fédération de France du FLN, au cœur de Paris, frappe l’opinion française qui voit, brusquement, la ville vivre une situation de guerre, notent de Rochebrune et Stora.

    Permettant à la presse internationale de témoigner de ce combat des Algériens pour leur liberté, cette manifestation de masse montre la puissance d’engagement des immigrés aux côtés du FLN. Et leur maturité politique, car aucun manifestant n’est armé’’.

    Onze jours après avoir atterri dans les rédactions, le communiqué au ton martial de Maurice Papon se traduit à l’épreuve du terrain. Une répression en règle s’abat sur les manifestants dès le début de soirée. Des rafales d’armes automatiques se font entendre dans les secteurs des boulevards Poissonnière, Bonne-Nouvelle et Montmartre. Des victimes sont signalées. Chargés sans ménagement, des manifestants se réfugient à l’intérieur des stations de métro. Ils sont rattrapés par les forces de polices qui ne lésinent pas sur la matraque.

    Tout au long de la nuit, les 9e et 10e arrondissements se transforment en lieu de rafles massives. Répression oblige, le palais des Sports de Paris change de vocation. Programmé depuis des mois pour abriter un concert du chanteur et musicien américain Ray Charles, le lieu a fait l’objet d’une réquisition et sans autre forme de procès. Il sera, des semaines durant, un lieu de détention des manifestants raflés dans Paris et sa banlieue. Cette ‘’nuit portée disparue’’ verra l’entrée en lice des ‘’harkis à Paris’’ comme le racontera, plus tard, la journaliste Paulette Péju, épouse de Marcel Péju, compagnon de Jean-Paul Sartre, secrétaire des ‘’Temps modernes’’ et signataire du ‘’Manifeste des 121’’ sur le droit à l’insoumission dans la guerre d’Algérie.

    A l’heure des bilans pour les besoins – contraints – de la communication officielle, Préfecture de Police et ministère de l’Intérieur parlent de deux morts, soixante-quatre blessés et 11 538 arrestations. Dans la foulée de la répression, la Fédération de France du FLN évoque 200 morts et 400 disparus. Plus tard, à l’heure de la sortie en France de son livre ‘’La 7e Wilaya. La guerre du FLN en France’’ (Paris, Le Seuil 1986), Ali Haroun, membre du Comité fédéral de la Fédération de France dira : ‘’La Fédération a été dans l’incapacité de fixer le nombre (des victimes) de manière précise, d’autant que, parmi les éléments recensés +disparus+, il devait se trouver nécessairement des militants transférés en Algérie et dont on ne retrouve plus la trace.

    Cependant, la synthèse des rapports militants sur le cas précis des tués, le 17 octobre et les jours suivants, par balles, matraquages, noyades et autres moyens, permet de les chiffrer approximativement à 200 et les blessés à 2300’’. Résolument engagée en faveur de l’indépendance algérienne, ‘’Les Temps modernes’’ – revue animée par le trio Sartre- Claude Lanzmann et Péju – avait cité à l’époque une autre estimation officieuse de l’Inspection générale de la police, un organe rattaché au ministère de l’Intérieur : 140 morts.

    Dans ‘’La Bataille de Paris, 17 octobre 1961’’ (Paris, Le Seuil 1991) – livre qui a fait rejaillir la tragédie dans le débat médiatique –, le chercheur Jean-Luc Einaudi avait parlé de 150 morts avant de réviser le bilan à la hausse (200 morts). Auteurs d’un travail académique fondateur et très documenté sur le sujet – ‘’Paris 1961/ Algerians, State Terror dans Memory’’ (Oxford University Press 2006), les historiens britanniques Jim House et Neil Mac Master livreront une estimation de l’ordre d’une ‘’centaine’’.

    Mais, au-delà de cet indicateur, le travail des deux anglo-saxons aura le mérite de souligner la ‘’terreur d’Etat’’ de la France coloniale à l’heure et de la répression sanglante du 17 octobre 1961. Et de la situer au miroir de répressions urbaines qui ont marqué l’Histoire. ‘’Le 17 octobre des Algériens’’ (dixit Marcel et Paulette Péju) a été la répression ‘’la plus violente et la plus meurtrière qu’ait jamais subie une manifestation de rue désarmée dans toute l’histoire contemporaine de l’Europe occidentale’’.

    Par S. Raouf

    Le Jeune Indépendant, 17/10/2021

  • Les initiatives d’apaisement de Macron ne sont pas suffisantes

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    Le président français, Emmanuel Macron, a tenu à éviter l’improvisation lors de sa participation, samedi, aux cérémonies de commémoration des martyrs tués lors des manifestations qui ont eu lieu à Paris le 17 octobre 1961, et a préféré publier une déclaration écrite distribuée aux médias.

    Il semble que le président français était convaincu que les propos qu’il a tenus de manière impromptue il y a plus de deux semaines devant la jeunesse d’origine algérienne sur l’Algérie et son passé lui ont valu de gros ennuis politiques auxquels il ne s’attendait pas, aussi a-t-il préféré cette fois-ci une déclaration écrite pour éviter tout dérapage.

    Fait inhabituel, le président français a gardé le silence lors de la commémoration des massacres, sous le pont où les Algériens ont manifesté le 17 octobre 1961, en réponse à un couvre-feu strict imposé aux Algériens qui réclamaient la fin de la domination coloniale française en Algérie, avant de déposer une gerbe en l’honneur des victimes, dont le nombre a été limité par la France coloniale à seulement trois personnes, alors que les statistiques indépendantes parlaient de centaines.

    Macron a observé une minute de silence sur le bord de la Seine, où les Algériens ont été tués alors qu’ils étaient menottés par la police du criminel Maurice Papon dans le fleuve français.

    Ses compagnons, qui sont des familles de manifestants martyrs et des représentants d’associations actives dans le domaine de la mémoire, ont jeté des roses dans le fleuve, dans une image symbolique en hommage aux victimes.

    Quelques minutes après la fin de la cérémonie de commémoration, l’Elysée a publié un communiqué dénonçant « les crimes inexcusables commis contre les Algériens le 17 octobre 1961. »

    Le communiqué de la présidence française indique que « le chef de l’État a avoué les faits. Les crimes qui ont été commis cette nuit-là sous l’autorité de Maurice Papon (le chef de la police de Paris de l’époque) étaient inexcusables pour la République », selon l’agence de presse française « AFP ». Il était clair ici dans la déclaration que le criminel Papon était tenu pour responsable, mais que l’acte avait été commis au nom de l’État français.

    Il est connu qu’environ 25.000 Algériens sont sortis le 17 octobre 1961, dans une manifestation dans la capitale française, Paris, à l’invitation de la Fédération française du Front de Libération Nationale, pour exprimer le rejet du cinquième décret d’octobre, qui interdit seulement aux Algériens de quitter leurs maisons après 20:30, parce qu’ils considèrent ce décret une décision discriminatoire et inacceptable.

    Comme le déclarent la présidence française et les écrits historiques, « Dans la soirée du 17 octobre 1961, et malgré le couvre-feu, plus de 25.000 hommes, femmes et enfants ont quitté leur domicile et se sont rendus dans de nombreux endroits de Paris où ils se sont rassemblés, mais la répression de la police française a été très brutale. »

    La présidence française reconnaît que « la répression a été brutale, violente et sanglante. » En outre, environ 12 000 manifestants ont été arrêtés et transférés au stade Pierre-de-Coubertin. Au cours des manifestations, de nombreux Algériens ont été blessés et des dizaines d’entre eux ont été tués, et des centaines, selon des historiens indépendants, ont péri après avoir été jetés dans la Seine par la police française alors qu’ils étaient brutalement enchaînés. À ce jour, les familles n’ont toujours pas retrouvé les corps de leurs proches disparus cette nuit-là », indique le communiqué de la présidence française.

    Macron, le premier président français à assister à une cérémonie commémorative pour les personnes tuées, a observé une minute de silence en leur mémoire au pont de Bezons sur la Seine, dans la banlieue de Paris, où la manifestation a commencé, mais les participations précédentes étaient limitées à l’ancien maire de Paris, Bertrand Delanoë, en plus de quelques élus.

    La participation de Macron à la commémoration était le plus qu’il a osé offrir aux Algériens qui exigent une reconnaissance française des crimes de l’État français en Algérie pendant un siècle et 32 ans, avec des excuses pour ces crimes, puis une compensation pour les richesses qui ont été pillées pendant cette période sombre de l’histoire de Paris, dont les responsables continuent d’échapper à la responsabilité de ce que leurs pères ont fait, à l’exception de quelques initiatives isolées qui, de l’avis des Algériens, ne restent que de la poussière dans les yeux.

    Echourouk online, 16/10/2021

  • France: massacre de Paris et tensions avec l’Algérie

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    Paris, France – Il y a soixante ans, des Algériens de Paris ont été arrêtés, tués et noyés dans la Seine par la police française. Ils manifestaient pacifiquement contre un couvre-feu qui leur était imposé quelques mois avant la fin de la guerre d’Algérie. Les archives estiment qu’entre 100 et 300 personnes ont été tuées, mais il n’existe pas de chiffre exact.

    Selon l’historien Fabrice Riceputi, c’est parce que ce qui s’est passé le 17 octobre 1961 dans le centre de Paris est un « massacre colonial ». « L’une des caractéristiques de tous les massacres coloniaux dans l’histoire est qu’il est impossible de faire des évaluations précises », a-t-il déclaré à Al Jazeera. Largement considéré par les historiens comme la répression la plus violente d’une manifestation dans l’Europe occidentale de l’après-guerre, beaucoup en France refusent encore de l’affronter.

    Mais aujourd’hui, dans le contexte de mouvements sociaux croissants qui réclament la justice raciale et la fin des brutalités policières, la pression est de plus en plus forte pour que la France affronte son passé violent.

    En 2012, François Hollande, alors président, a reconnu la « répression sanglante » de 1961, mais les historiens affirment que le gouvernement n’a pas pris de mesures concrètes et que les informations sur cet événement continuent d’être supprimées.

    « Ce qui est réclamé depuis les années 1990, et demandé par de nombreux groupes, c’est que le chef de la République française, donc le président, reconnaisse officiellement qu’il ne s’agissait pas d’une erreur regrettable, mais d’un crime d’État », a déclaré Riceputi. « C’est ce que nous attendons du président [Emmanuel] Macron pour le 60e anniversaire ».

    L’événement le plus douloureux

    Le 17 octobre 1961, les Algériens de Paris sont appelés à organiser une marche du Front de libération nationale algérien. Des milliers d’entre eux se sont rendus sur place pour réclamer une Algérie indépendante, malgré un couvre-feu imposé.

    La violente répression ordonnée par le préfet de police de Paris de l’époque, Maurice Papon, est sans équivalent.

    « Maurice Papon a appris à appliquer ces méthodes de terreur à Constantine en Algérie pendant plusieurs années, et il les a importées à Paris », a déclaré Riceputi à propos du tristement célèbre Papon, condamné en 1998 pour complicité avec le régime nazi.

    Pour les Algériens de France, le souvenir reste vivace dans la mémoire collective.

    « Pour moi en tout cas, c’est peut-être l’événement le plus douloureux de toute la période coloniale », a déclaré à Al Jazeera l’historienne algéro-américaine Malika Rahal, qui a grandi en France. « Cela ne remet pas en question votre relation à l’Algérie, mais cela remet en question votre relation à la France tous les jours ».

    De la censure des journaux à l’empêchement des procès des accusations déposées par les Algériens, les chercheurs ont déclaré que l’effort de l’État français pendant des décennies pour cacher des informations était institutionnalisé.

    « C’est une partie du crime », a déclaré Riceputi. « Il a été commis et immédiatement nié, et le gouvernement a tout fait pour imposer le silence, pour couvrir l’événement ».

    Rahal a déclaré que lorsqu’elle étudiait l’histoire à Paris dans les années 1990, beaucoup de ses collègues de l’époque ne connaissaient pas le massacre de Paris. Elle en a d’abord entendu parler par sa famille algérienne, mais l’événement a été si traumatisant pour son père qu’il ne s’est jamais ouvert pour parler de ce qui s’est passé.

    Même les historiens étrangers disent avoir eu du mal à accéder à certains documents.

    Amit Prakash, un professeur américain qui écrit sur la décolonisation française, a déclaré que lorsqu’il est arrivé à Paris pour étudier les archives, il a souvent été « bloqué ».

    Ils m’ont donné accès à beaucoup de choses, mais ils m’ont dit : « Le 17 octobre, les dossiers que j’ai demandés ne relèvent pas de cette question », a-t-il déclaré.

    Selon M. Riceputi, le sujet reste tabou car il déclencherait à nouveau une remise en question de l’image publique et des valeurs de la France.

    « Cela signifierait que nous acceptons enfin d’apprendre que la République française n’est pas une entité parfaite par définition. Elle est l’héritière des Lumières, de la Déclaration des droits de l’homme, mais elle est aussi l’héritière de ce passé colonial criminel. »

    Tensions de Macron

    La pression monte sur Macron pour qu’il profite du 60e anniversaire pour reconnaître les violences, une tâche qui, selon les analystes, est loin d’être simple.

    La question de l’Algérie continue de diviser en France. Les politiciens de droite ont par le passé refusé d’en discuter, et les personnalités d’extrême droite sont nostalgiques de la période coloniale de la France.

    Alors que Macron se prépare à l’élection de 2022 et que l’extrême droite monte dans les sondages, les experts estiment que si le président français devait faire un commentaire, il est peu probable qu’il bouleverse le statu quo.

    Dans le même temps, Macron navigue dans des relations diplomatiques tendues avec l’Algérie.

    Fin septembre, la France a déclaré qu’elle réduirait considérablement le nombre de visas accordés à l’Algérie – ainsi qu’au Maroc et à la Tunisie – pour avoir refusé de reprendre les migrants en situation irrégulière.

    Mais ce qui a réellement provoqué l’ire d’Alger, c’est la manière dont Macron a abordé le passé colonial de la France. Le 30 septembre, le président français a invité plusieurs jeunes d’origine algérienne au palais de l’Élysée pour discuter de la guerre d’Algérie.

    Le Monde rapporte que Macron leur a posé la question suivante : « Y avait-il une nation algérienne avant la colonisation française ? »

    Pour Arthur Asseraf, historien et maître de conférences à l’université de Cambridge, Macron a essayé d’être provocateur, mais cette démarche est en fait « la plus vieille ruse du livre » – celle utilisée pour justifier la colonisation.

    Selon des observateurs comme Rahal, la longue occupation de l’Algérie par la France – 132 ans – signifie qu’en fin de compte, même si Macron reconnaît la complicité de la France dans le massacre de Paris, « Alger ne dira jamais merci… parce que les deux pays sont très différents en termes de valeurs. L’Algérie est absolument anticoloniale et la France n’a jamais pris le tournant anticolonial. »

    Macron devrait devenir le premier président français à assister à une cérémonie officielle de commémoration du massacre, bien que l’Élysée, contacté plusieurs fois par Al Jazeera, n’ait pas été en mesure de discuter de plus amples détails.

    Une marche commémorative aura lieu à Paris, organisée par 120 syndicats et organisations.

    Et les militants demandent à l’État français de créer un site officiel de commémoration, d’ouvrir toutes les archives, d’inclure cet événement dans le programme scolaire et d’accorder des réparations aux descendants des victimes.

    « C’est un événement qui n’a peut-être jamais été autant d’actualité qu’aujourd’hui », a déclaré Riceputi. « Parce qu’il s’agit de violences policières. En France, depuis quelques années, on sait ce que c’est. Et c’est aussi une question de racisme systémique, on sait aussi ce que c’est en France (…) donc ça mobilise beaucoup de monde. »

    Aljazeera, 15/10/2021

  • Macron, prêt à une dégradation des relations avec l’Algérie

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    POUR CONFORTER SA POSITION DANS LA COURSE À LA PRÉSIDENTIELLE : « Macron est prêt à assumer une dégradation conjoncturelle des relations avec l’Algérie »

    L’historien et politologue français, Olivier Le Cour Grandmaison estime que le président Emmanuel Macron « est prêt à assumer une dégradation conjoncturelle des relations avec l’Algérie » si cela lui permet, a-t-il affirmé, dans un entretien à l’APS, «de conforter sa position de leader dans la compétition électorale en cours », pour la présidentielle française prévue dans six mois. À une question sur l’impact des déclarations du locataire de l’Élysée contre l’Algérie, au lendemain de sa réception d’une délégation de Harkis et dans un contexte politico-médiatique rythmant la campagne de la présidentielle française sur des dossiers chèrs à l’extrême droite et la droite en France, l’historien Le Cour Grandmaison affirme que « Macron, en bon opportuniste se plie au sinistre air du temps politique qui est celui de la France ». L’auteur du livre « La République impériale : politique et racisme d’État » publié en 2009, après avoir relevé, que nul ne lui échappe l’ entrée en course du président Macron dans la campagne présidentielle française, il précise que « Emmanuel Macron est en campagne pour sa réélection dans un contexte de radicalisation des droites de gouvernement qui cèdent toutes aux violents discours racistes, xénophobes et islamophobes d’Eric Zemmour, sans oublier le Rassemblement national » affirme le politologue, Olivier Le Cour Grandmaison.

    Des observateurs de la scène française relevant que l’enjeu principal de la future présidentielle, étant l’ombre de l’abstention qui n’a cessé de prendre de l’espace et planer sur les élections en général en France, soulignent que les conditions socio-économiques difficiles des Français, aggravées avec plus de deux ans de pandémie sanitaire ont animé le sentiment de rejet de la classe politique française, qui vacille, selon eux entre le discours de droite et de l’extrême-droite, éviter le débat politique sur les raisons de cette faillite et les questions fondamentales , liées, à la retraite, les pertes d’emplois, le chômage, le recul voire l’abandon de services publics, de la santé, de l’Éducation ect..

    À six mois de la présidentielle alors que les Français sont plongés dans les inquiétudes de la baisse du pouvoir d’achat et qu’aucune perspective de réponses rassurantes en matière d’amélioration de la vie socio-économique, de la majorité des français, le parti du président Emmanuel Macron, se préoccupe des échos et des impacts des propos et de la propagande d’Eric Zemmour. Des médias français rapportent dans ce cadre que le parti de la République en Marche « se réjouit de la montée d’Eric Zemmour, car, plus il affaiblit Le Pen, plus il favorise Macron ». Hier, le spécialiste du train de vie de l’État français, René Dosière, président de l’Observatoire de l’éthique publique a annoncé que « 160 millions d’euros par an, c’est ce que coûterait chaque année la quarantaine de cabinets ministériels du gouvernement de Jean Castex » et de préciser que « cela en ferait le gouvernement le plus coûteux de la Ve République » selon René Dosière, l’ex-député PS et de noter qu’ «qu’il s’agit d’un des gouvernements les plus nombreux : plus de ministres, de collaborateurs, avec des rémunérations toujours élevées mais qui ont tendance à diminuer ces dernières années ».

    Emmanuel Macron et des acteurs politiques reprennent les thèmes de l’extrême-droite en les recyclant dans « un verbiage républicain jugé plus présentable »

    La mise en avant sur la scène médiatique française de voix porteuses de discours de haine et de racisme, notamment à travers celui qui a été le produit final de cercles politico-médiatiques, d’un processus entamé, depuis la fin des années 80, vise le maintien de la surmédiatisation de l’orientation du gouvernail du débat politique de la présidentielle, sur les questions fondamentales de l’extrême-droite, portée depuis les années 80, par Jean Marie Le Pen et son mouvement, avant de les céder en héritage, à sa fille, chef de file du RN, Marine Le Pen. Celle-ci qui tente sa dernière chance d’une présidentielle française, que son père avant elle n’a pas réussi certes à gagner mais dont les campagnes électorales leur ont permis de diffuser leur idéologie d’extrême-droite vient de se voir bousculer par un nouveau son, celui d’Eric Zemmour, mais non une nouvelle voix en faveur de l’extrémisme et la haine et contre la diversité de la société française, pointe le danger de tout ce qui n’est pas français de souche.

    Un contexte qui ne pouvait échapper à celui qui propulsé par les milieux de la finance et du Capital, lors de sa première campagne électorale présidentielle, en s’appuyant sur l’éclatement du parti socialiste PS et les turbulences du centre droit et de la droite, le locataire de l’Elysée semble bien profiter des sorties politico-médiatiques de Zemmour pour s’alimenter et alimenter le débat de la présidentielle et lui donner une orientation, sur des questions en direction exclusivement des électeurs de la droite et l’extrême droite. Pour Le Cour Grandmaison qui a publié en 2005, « Coloniser, exterminer : Sur la guerre et l’État colonial », les déclarations irresponsables et agressives du président de la France sur l’Algérie et son peuple, ce sont « des propos liés à cette conjoncture et à sa volonté de courtiser un électorat de droite dont il a absolument besoin », estimant que le président français « est prêt à assumer une dégradation conjoncturelle des relations avec l’Algérie si cela lui permet de conforter sa position de leader dans la compétition électorale en cours ».

    Poursuivant , l’historien et politologue La Cour Grandmaison, indique que « pour lui (le président Macron) , comme pour beaucoup d’autres, lutter contre les extrême-droites consiste désormais, depuis longtemps hélas , à reprendre certains de leurs thèmes en les recyclant dans un verbiage républicain jugé plus présentable », relevant que « l’ensemble est maintenant désigné par un vocable très en vogue, celui de –régalien- qui inclut évidemment les questions sécuritaires ».

    Les acteurs politiques en France, notamment ceux et celles mis sous les projecteurs des médias, loin d’être dans le cadre de la liberté de la presse et d’opinion, dans un espace médiatique ou la part des grandes marques pèse lourdement. En 2019, les groupes des Arnault, Bolloré, Bouygues, Lagardère, Drahi, Pinault, Niel, Pigasse, Dassault et Baylet ont engrangé plus de la moitié des aides publiques à la presse (61%), soit un peu plus de 54 millions d’euros, dont 13 millions pour le seul groupe de Bernard Arnault, révèle récemment une campagne autour d’ appels à agir pour aider le journalisme indépendant, au service du public, relayé, par Mediapart.

    Des groupes économiques puissants qui sont confortés dans des débats ou les questions de fond préoccupant de larges couches de la société française, de divers horizons, sont absentes, telles le modèle socio-économique, les choix économiques, l’écologie, les changements climatiques ect.. Pour cet universitaire, « ce vocable truffe les discours de ceux qui soutiennent la majorité présidentielle et qui cherchent à passer pour sérieux, responsables et à l’écoute des Français, comme ils disent ». « C’est ainsi que ces thèmes se trouvent aujourd’hui au plus haut de l’agenda politique de nombreux candidats à l’élection présidentielle », a-t-il conclu.
    Karima Bennour

    Le Courrier d’Algérie, 16/10/2021

  • Algérie-France : la chanson douce du déni

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    Les propos d’Emmanuel Macron continuent de faire des vagues. Et non des moindres. Cette fois c’est sur la langue française que le ton monte.

    Ton présent…chaque fois que les relations algéro-françaises sont secouées par le « je t’aime moi non plus ».

    Et c’est dans cette foulée, que le directeur de l’enseignement supérieur au ministère du même nom, a annoncé mercredi passé, que l’essentiel du programme pédagogique des deux écoles supérieures de mathématiques et d’intelligence artificielle, nouvellement créés, sera en anglais.

    Mesure populiste ou rythme ternaire habituel des brouilles et qui se tassera comme d’hab ?

    Sous les fâcheries, le pluriel des discordes et le singulier du butin de guerre, comme disait Kateb Yacine ?

    Mais la vraie question est : a-t-on les moyens, tous les moyens, humains, pédagogiques, techniques pour amorcer un virage à 360°, et troquer l’anglais pour le français dans les plus hauts paliers de notre enseignement supérieur ?

    La réponse envoie paître la langue de Shakespeare avec La Chèvre de Mr Seguin. Et la question paraît aussi improbable que la dissipation du « Fog » dans les hauts du Hurlevent.

    En réalité , pour réaliser la prouesse de congédier le français , il faudrait s’y mettre dès les premières initiations du primaire, après avoir formé pendant des années, les instits, les profs, les S.G, les proviseurs et changer de but en blanc tous les outils pédagogiques en anglais. Ce qui n’est pas une sinécure.

    Butin de guerre a dit Kateb…Alors utilisons le, ce butin.

    Et disons à Macron que ses sonnets et ses alexandrins, récités à des gosses qualifiés de petits enfants de la guerre d’Algérie, sentent la chanson douce du déni que pérore Zemmour et qui lui met l’eau à la bouche.

    Et affrontons le dans sa langue, en lui donnant le la, et lui rappeler que la mémoire ne peut être une rente, car elle est marquée par tant de saloperies coloniales que même Prévert ne pourrait inventorier. Et qui vont de l’enfumade au napalm , du pillage au saccage , de la torture à la corvée de bois.

    Macron voulant à tout prix se faire réélire à l’Elysée ? Il le peut aisément mais sans marcher sur le cadavre encore fumant…d’une mémoire saccagée par 132 ans de génie civilisateur français.

    Madjid Khelassi

    La Nation, 10/10/2021

  • Algérie-France: Témoignages et vérités

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    En ces temps de vives tensions entre l’Algérie et la France, dues aux propos de certains dirigeants français en mal d’électoralisme, il convient de séparer le bon grain de l’ivraie. S’il existe un bon nombre (bon est, ici, un terme impropre) de Français qui nourrissent une haine viscérale envers l’Algérie pour des raisons évidentes, il existe, aussi, un plus grand nombre de Français qui n’ont aucun a priori vis-à-vis du peuple algérien. Et pour cause, combien n’ont-ils pas hésité, au prix de leur carrière, et même de leur vie, à soutenir la cause de l’indépendance et à contribuer à son triomphe! Qu’ils soient éternellement remerciés pour cet engagement dont témoignent l’«Appel des 100», les «porteurs de valise» du réseau Francis Jeanson, Robert Barat dont l’épouse Denise a subsisté grâce au soutien de l’Amicale des Algériens en Europe (AAE) et de Témoignage Chrétien, les contributions méconnues de personnalités comme Yves Montand, Simone Signoret, Serge Reggiani, Picasso, et bien d’autres.

    Pour avoir vécu en France plus de deux décennies, je peux témoigner du fait que la majorité des Français porte une amitié, sinon une sympathie, authentiques envers notre peuple et notre pays. Tel n’est pas le cas de la classe dirigeante? Là aussi, il faut relativiser.

    J’ai connu certains comme Daniel Junqua (red-chef au Monde, puis directeur du CFPJ), Claude Angeli (red-chef du Canard enchaîné, que j’eus bien du mal à consoler, après une charge terrible de mon regretté ami et père spirituel, Me Mourad Oussedik, contre les Lambertistes du PS, lors d’un procès intenté par l’Algérie), Françoise Gaspard, députée PS d’Eure et Loir, Paul Quilès, député-maire PS du XIIIème arrdt de Paris, puis ministre des Transports, de l’Intérieur, etc, dans le gouvernement Rocard – que j’ai, tous deux, interviewés pour le compte d’Algérie – Actualités, Jean-Pierre Goetzinger, maire PR du XIème arrdt de Paris, et son épouse Jeannie, dont j’étais l’invité du dimanche pendant de nombreuses années, et tant d’autres, anonymes, comme Félix et Nicole Szempruch, Michel et Chantal Poillot. En les côtoyant, j’ai eu la chance de vérifier, maintes fois, que tout n’est pas blanc ou noir, au pays de Voltaire.

    Tous savaient que j’étais un cadre de l’AAE, héritière de la Fédération de France du FLN, dont le travail et la vigilance, au sein de notre communauté, ont donné à notre pays une jeunesse flamboyante qui fait, actuellement, le bonheur des Fennecs. Cette casquette ne les gênait nullement et je ne manquerai pas de dire que beaucoup, inoubliables dans mon coeur et dans mon esprit, ont fortifié ces certitudes.

    Alors, de grâce, pas plus que le peuple marocain n’est responsable des turpitudes du Makhzen, ne cédons pas à l’amalgame et à la vindicte aveugle, et souvenons-nous que nous avons, toujours, en France, des amis sincères et exemplaires, à bien des égards. Gardons-nous de la confusion des genres dans laquelle se noient, avec allégresse, certains politiques qui en font leur fonds de commerce et dont la principale vertu est d’imiter les girouettes.

    Chaabane BENSACI

    L’Expression, 14/10/2021

  • Tebboune a instauré les règles de la réciprocité

    Algérie, France, Emmanuel Macron, Abdelmadjid Tebboune, #Algérie, #Macron, #Mémoire,

    Le Président de la République algérienne, Abdelmadjid Tebboune, « a instauré de nouvelles règles pour les relations algéro-françaises, basées sur la réciprocité, l’égalité et le respect de la souveraineté et de la décision de l’Etat et du peuple algériens », a estimé le rédacteur en chef du quotidien tunisien « Al-Chourouk », Abdelhamid Riahi.

    Dans un éditorial paru mercredi sous le titre « L’Algérie des Libres…l’Algérie des valeurs et des principes », le journaliste a salué « l’Intifada » du président Tebboune en réaction aux déclarations récentes du président français, Emmanuel Macron, à l’encontre de l’Algérie et ses institutions.

    « Cette +Intifada+ a posé de nouvelles règles pour les relations algéro-françaises, basées sur la réciprocité, l’égalité et le respect de la souveraineté et de la décision nationales de l’Etat et du peuple algériens, et ce, en remettant les descendants de Jules Ferry +théoricien de la colonisation+ dans la réalité des choses et dans leur véritable dimension », a-t-il écrit.

    « Au-delà du président et de l’Etat français, +l’Intifada de l’Algérie+ est un message à toutes les forces de l’arrogance dans le monde, qui se croient au-dessus du droit international (…) et qui se permettent de faire fi des règles de bienséance et des us des relations internationales ».

    Soulignant que l’Algérie « a de tout temps été une grande Nation, un Etat de principes et un peuple épris de justice, de bravoure, de fierté et d’altruisme », l’auteur de cet éditorial affirme que « ces valeurs ont été pour le colonisateur français une leçon de lutte et de défense de la patrie, et pour les peuples du Tiers-monde un modus opérandi du sacrifice pour la terre et pour l’honneur ».

    « Ces valeurs de l’Algérie et la dignité et la fierté de son peuple se sont illustrées récemment face à la résurgence de la nostalgie coloniale (…) chez le président français », a-t-il relevé mettant en avant le rôle de l’Algérie au sein de l’ONU, depuis son indépendance, en faveur des pays du Tiers monde et du Mouvement des non-alignés.

    « Sa voix est demeurée pesante dans les fora internationaux pour la défense des opprimés et le triomphe des causes justes pour la liberté et l’émancipation », a-t-il ajouté.

    Evoquant « l’élan » de solidarité de l’Algérie, sous la conduite du président Tebboune, avec la Tunisie « face aux mêmes forces de l’arrogance qui tentent de faire pression sur notre pays », le journaliste tunisien a indiqué que le président algérien « a été clair et audacieux en affirmant que quiconque serait tenté de menacer la sécurité de la Tunisie, devra compter avec l’Algérie et en conseillant aux adeptes de l’ingérence dans les affaires internes, de la Tunisie ou de l’Algérie, de balayer plutôt devant leurs portes et de s’abstenir de donner des leçons (…) ».

    En conclusion, il a exhorté « ceux qui, parmi les Tunisiens, ont vendu leur conscience en faisant appel aux appuis étrangers contre leur pays à écouter la voix de l’Algérie, la voix de la sagesse et du courage (…) et à y puiser, ne serait ce que peu, de ses valeurs de patriotisme sincère, de fierté et de dignité ».

    Horizons, 15/10/2021

  • La France, pays ami ou ennemi ?

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    La réponse à cette question ne souffre d’aucun doute pour l’ancien ministre du Travail de la République Algérienne Démocratique et Populaire, qui a qualifié la France « d’ennemi éternel et traditionnel » le 7 avril 2021 lors d’une question parlementaire sur le déficit actuel de la Caisse de retraite algérienne.

    Un vrai vent de franchise et de courage qui tranche avec la langue de bois dont usent tous les responsables algériens depuis la disparition de Boumediène et la soumission frisant la servilité qu’ils ont adoptée devant l’ancien colonisateur. C’est peut-être pour cela que son expression a suscité cette incroyable levée de boucliers en France et aussi, bizarrement, en Algérie où on lui a reproché d’avoir fait intrusion dans un domaine qui n’était pas celui de ses compétences ministérielles. Comme si, lorsqu’on on est ministre, on devait se départir de ses convictions et même de ses attributs d’homme et de citoyen !

    Définitions

    Selon le dictionnaire  » Le Robert « , l’amitié est un sentiment réciproque d’affection et de sympathie qui ne se fonde ni sur les liens du sang, ni sur l’attrait sexuel. Quand il s’agit de relations entre pays ou entre collectivités,  » Le Larousse « , définit l’amitié comme  » des relations fondées sur une bonne entente « , au contraire de l’ennemi entre nations, celui à qui on s’oppose constamment.

    A la lecture de ces définitions données par les références mêmes de la langue française, il est évident que, sans parler d’éternité, la France n’a jamais été une amie de l’Algérie à n’importe quel moment de l’Histoire et de quelque manière que ce soit. Et surtout après l’indépendance algérienne, tout en minimisant l’ampleur de sa défaite et sa piteuse débâcle, cherchant même à les transformer en acte volontaire conforme au  » courant de l’Histoire « , avatar français du fameux  » déterminisme historique  » marxiste.

    Jusqu’à nos jours, la France n’a jamais donné sa voix à une seule initiative menée par l’Algérie indépendante dans le cadre de ses activités diplomatiques et de sa participation dans les instances internationales. Elle a toujours voté contre et, dans les cas où c’était incompréhensible, sinon indécent de voter contre, elle s’abstenait.

    Aux origines de cette hostilité

    L’Histoire nous dit que tout cela a commencé il y a bientôt 1000 ans, en novembre 1095 plus exactement, après le concile de Clermont mené sous la houlette du pape français Urbain II, et au cours duquel la religion chrétienne subit la plus profonde métamorphose de son histoire : son passage d’une religion de paix et de fraternité en la religion la plus belliqueuse, la plus violente et la plus cupide de toutes les religions monothéistes.

    C’est là que fut initiée et lancée, sous couvert de l’alibi religieux, la plus grande agression impérialiste jamais menée contre le monde arabo-musulman par l’Occident chrétien : les Croisades. Le concile de Clermont, par la voix du pape Urbain II, dit  » Le Bienheureux « , a transformé la religion chrétienne, cette religion dont la devise était  » Tu ne tueras point « , en une religion qui autorisait et poussait ses adeptes à tuer en son nom ; et même de bénéficier des récompenses divines pour avoir tué d’autres humains qui ne partageaient pas leur foi, les Musulmans en l’occurrence. Les Croisades seront le précurseur de l’autre génocide planétaire, celui des peuples amérindiens, toujours mené sous l’égide de la  » vraie religion  » et son corolaire, l’or et l’argent. Les Croisades durèrent deux siècles et se terminèrent officiellement en 1270 après la mort peu glorieuse du roi de France Louis IX, dit  » Saint-Louis « , (dont les Francs ramenèrent le squelette, démembré après avoir bouilli le corps pour le débarrasser des parties putrescibles afin de résister aux aléas du transport et éviter ainsi qu’il ne soit enterré en terre d’Islam), même si deux autres expéditions furent mises sur pied ultérieurement et qui firent long feu. Et, convenons-en, même si elle revêt d’autres formes, la série est actuellement toujours en cours avec les drames irakiens, libyens, syriens, afghans, yéménites, l’agression continue contre l’Iran et les catastrophes annoncées au Mali, Burkina-Faso, Tchad et Niger et, bien sûr, le drame palestinien dans lequel la France est, proportionnellement à sa taille et à sa population de confession hébraïque, le premier soutien mondial de l’Entité sioniste, tant sur le plan diplomatique, technique ou financier, que sur celui de la fourniture de conscrits au service de l’entreprise génocidaire que le monstre sioniste mène contre le peuple palestinien. Ces croisades, même si elles ont bénéficié d’une participation européenne, ont, en réalité, toujours eu pour principal maître d’œuvre le royaume des Francs. Et, d’ailleurs, les Musulmans ne se sont jamais trompés sur l’identité réelle de leurs agresseurs qu’ils ont toujours nommés  » al Franj « ,  » les Francs « .

    Pierre, tout comme Aïssa (Jésus), était palestinien, Paul et Jean étaient syriens, Constantin était romain, Augustin était algérien et Clovis, le premier roi de France chrétien ne s’est converti au christianisme qu’au début du VIème siècle, soit plus de 500 ans après la mort du christ, mais c’est la France qui se proclame jusqu’à ce jour  » fille aînée de l’Eglise  » et défenseuse d’une religion venue d’autres lieux, appartenant à d’autres peuples et à l’émergence de laquelle elle n’a que très peu contribué. Cela semble anecdotique et incroyable aujourd’hui mais la  » défense  » de la religion catholique face à la montée en puissance de l’Islam et la lutte implacable et sans merci que mène le monde occidental chrétien depuis des siècles contre l’émergence d’un Etat arabe ou musulman puissant, n’importe où qu’il soit dans le monde, et surtout au sud de la Méditerranée, reste un des moteurs principaux de la politique extérieure actuelle de la France et d’une partie du monde occidental chrétien et, certainement, pour longtemps encore. Mais cette persistance et ces réminiscences du passé ne peuvent expliquer à elles seules toute l’hostilité que la France a toujours manifestée à l’encontre de l’Algérie indépendante. Et les explications simplistes, naïves, voire infantiles, avancées par l’Algérie officielle à propos de l’existence d’un lobby pied-noir revanchard et nostalgique du paradis perdu qui imposerait ses quatre volontés à la France, cet Etat puissant, centralisé et jacobin, disposant d’une administration et de forces de sécurité hors du commun, dans ses relations avec un pays majeur, ne tiennent pas la route à notre époque. En fait, les enjeux sont ailleurs.

    Pour comprendre les enjeux

    Sur le plan historique, notre pays a constitué depuis des siècles une cible privilégiée pour la France, comme pour d’autres puissances en désir d’hégémonie, parce qu’il est le mieux doté par la nature de ce côté-ci de la Méditerranée, disposant de très grands espaces regorgeant de ressources et, surtout, défendu depuis des millénaires par son propre peuple, quel que soit le nom que les uns et les autres lui ont donné. Sans négliger les motivations religieuses avec leur désir aussi féroce qu’insensé de faire revenir à la foi chrétienne ce rivage sud de la Méditerranée, cette patrie de Saint Augustin, le père de l’Eglise latine dont la France nous envie tant la paternité jusqu’à nous la dénier, et, surtout, celle de Tarik ibnou Ziyad, le conquérant de la Péninsule Ibérique et de la France méridionale. Cela sans oublier les motivations bassement cupides et leur soubassement raciste et suprématiste, et que la France n’a jamais formellement reniés malgré les oripeaux humanistes dont elle se drape. Et, aussi, malgré le fait que, durant des siècles, la France ait bénéficié de généreuses concessions commerciales accordées par les différents pouvoirs algériens, comme l’établissement de comptoirs, ces zones franches avant l’heure,sur de nombreux points de la côte algérienne, rien ne l’a empêchée de mener l’agression ultime qui a débuté un certain juillet 1830 et qui ne s’est achevée que 132 années plus tard après qu’elle ait dévasté le pays, volé tout ce qui pouvait l’être et saboté tout ce qui ne pouvait pas être emporté. Pour rappel, la France a emporté tous les plans des VRD (voiries et réseaux divers) des grandes villes algériennes, incendié la bibliothèque universitaire d’Alger après l’avoir délestée de ses trésors, des ouvrages et manuscrits uniques et emporté avec elle les plans de minage de milliers de kilomètres carrés qui continueront à faire des milliers de victimes avant que l’Armée Nationale Populaire ne parvienne à nettoyer la terre des chouhada.

    Que craint donc la France de l’Algérie ?

    Objectivement, que peut craindre la France de l’Algérie aujourd’hui ? Que peut craindre une des premières puissances économiques, industrielles, financières, militaires et impérialistes du monde actuel de la part d’un pays empêtré dans les affres du sous-développement et du réchauffement climatique, submergé par sa démographie, trahi par ses propres dirigeants, cerné de toutes parts par des ennemis féroces ; bref, un pays qui a gâché la quasi-totalité des valeurs fondatrices de son identité, qui a perdu deux fois son élite en l’espace de 40 années (l’hécatombe de la guerre coloniale et celle de la folie islamiste), dont 87% des étudiants ne rêvent que de partir ailleurs, une fois leurs études (entièrement gratuites et même rémunérées !) terminées ? Sans parler de cette tragique propension à jouer son avenir à la roulette russe à chaque échéance électorale depuis bientôt 33 années. Pas grand-chose mais cela ne veut pas dire que la France n’a rien à craindre de l’Algérie. Là est la nuance.

    L’Algérie constitue un des centres de préoccupation et de fixation les plus importants de sa politique étrangère, un pays qu’elle scrute et surveille comme le lait sur le feu, une obsession qui arrive juste derrière les grands complexes existentiels qu’elle nourrit envers quelques rares autres pays, l’Allemagne et les U.S.A. en tête.

    Depuis 1830, l’exploitation effrénée de l’Algérie a permis à la France de se renflouer alors qu’elle était en faillite, traversant une phase de déclin dramatique, menacée de dépeuplement après des décennies de guerres qui ont exterminé une grande partie de sa population mâle. Elle a trouvé dans l’eldorado algérien tous les ingrédients pour sa survie et même pour sa renaissance : argent, espaces, main d’œuvre laborieuse et rustique et des contingents militaires qui ont constitué le fer de lance de toutes ses aventures guerrières ou coloniales, depuis la guerre de Crimée au milieu du XIXème siècle jusqu’à la seconde guerre mondiale en passant par la guerre de 1870 contre la Prusse, la première guerre mondiale ou la conquête de Madagascar, sans oublier les aventures mexicaines de Napoléon III (1862-1867).

    Les 132 années de relations extrêmement intenses, même si elles ont été imposées par les crimes les plus atroces qu’un être humain pouvait imaginer ont tissé des liens innombrables, variés et intenses qui ont rendu la situation inextricable et complexe des deux côtés de la Méditerranée. Mais, une fois le divorce prononcé, au lieu que ces relations soient refondées et les liens renforcés sur une base apaisée, c’est l’inverse qui s’est produit car, visiblement, la France ne conçoit d’autres relations avec un pays faible, proche d’elle et musulman de préférence, que dans un rapport de suzerain face à des vassaux.

    Cependant, personne ne peut effacer d’un trait de plume les conséquences incommensurables que ce passé commun a laissées sur le plan humain, social et culturel et on nous dit aujourd’hui que l’Algérie est le deuxième pays francophone du monde et que la France compte aujourd’hui 5 à 6 millions, sinon plus, de citoyens d’origine algérienne, un chiffre énorme qui montre que, jamais la population française ne s’est autant mélangée à une autre population depuis l’Antiquité et la fameuse période gallo-romaine.

    Les Algériens sont présents en masse dans le pays et y sont vitaux en termes économiques, démographiques et culturels. Dans le climat de méfiance, voire d’hostilité permanente, qui sévit depuis des décennies, que faire pour éviter qu’une telle force sociale et économique aussi imposante par son nombre, et irrépressible dans sa progression, ne se double d’une force politique capable d’influer sur la marche du pays comme le font actuellement les citoyens juifs au profit de l’Entité sioniste alors qu’ils sont dix fois moins nombreux que les Algériens?

    La parade française

    La France a rapidement pris conscience de l’arme redoutable que constituait pour l’Algérie cette présence massive de citoyens d’origine algérienne chez elle, et elle est passée à l’action dès que Boumediène a commencé à afficher sa volonté de construire un état puissant, respectable et respecté et totalement dégagé de son emprise, la nationalisation des hydrocarbures ayant constitué le déclencheur de sa parade et de sa riposte . En plus des mesures économiques et financières tant médiatisées, celles-ci comportaient des mesures anodines ou anecdotiques en apparence, mais redoutables dans leurs effets :

    – Limitation puis suspension de l’appel à la main-d’œuvre algérienne, qui sera rapidement remplacée par l’immigration portugaise et marocaine,

    – Détection, isolement et élimination du champ politique ou associatif français, de toute personnalité française d’origine algérienne pouvant contribuer, par son action ou ses positions, à créer un lobby français en faveur de l’Algérie ;

    – Et, sur le long terme : saturation médiatique, désinformation tous azimuts, campagnes de dénigrement continues, mise en exergue des échecs algériens, même les plus minimes, et négation de tous les succès et de toutes les réussites. Et pourtant, Dieu sait que ces réussites sont innombrables, ne serait-ce que par le taux d’alphabétisation de la population qui est passé de 7% d’hommes et 3% de femmes alphabétisées en 1962, à 97% et 95% aujourd’hui !Avec un nombre d’étudiants dans les universités algériennes équivalent à celui de la France.

    Même si les moyens mis en œuvre étaient exclusivement puisés dans la panoplie de qu’on appelle aujourd’hui la  » soft-power « , la France venait de déclarer la guerre à l’Algérie de Boumediène et qui ne s’arrêtera pas à la disparition de ce dernier.

    Bien au contraire, celle-ci n’a jamais cessé de prendre de l’ampleur et d’user les armes nouvelles que le monde occidental chrétien ne cesse de mettre au point dans ses labos et d’expérimenter sur ses cibles, la France cherchant visiblement toujours à porter l’estocade à l’occasion des crises qui ont secoué et secouent périodiquement l’Algérie.

    Pour cela, elle a accueilli et accueille toujours sur son sol tout ennemi de la République Algérienne, tout voleur avec son butin, tout traître ou gredin ayant nui, ou voulant nuire d’une façon ou d’une autre à l’Algérie, tout en lui assurant la protection et toute l’assistance politique, administrative, policière et financière nécessaire à la poursuite de ses nuisances ; du terroriste islamique le plus sanguinaire au séparatiste le plus enragé.

    La diaspora algérienne et surtout sa descendance, a subi de plein fouet les effets de cette politique et, lentement, imperceptiblement, elle est passée d’un soutien sans failles au pays de ses racines pour glisser dans un scepticisme méfiant et critique, avant d’arriver à l’hostilité féroce envers tout symbole des institutions algériennes, en premier lieu celles qui sont à leur service immédiat, tout en limitant leur apports, surtout pécuniaires, déjà historiquement bien maigres, en les immergeant dans le circuit informel, cet autre redoutable ennemi de la RADP.

    L’Algérie, par l’arrogance et la suffisance de ses dirigeants auxquelles s’ajoutent la myopie et la servilité de leurs assistants, par la trivialité des discours et du comportement de la majorité de ses représentants à l’étranger qui ont reproduit le schéma de ce qui se pratiquait au pays, a fini par retourner contre elle l’arme absolue dont elle disposait face à l’ancien colonisateur.

    En plus de ça, et comme un malheur ne vient jamais seul, la pandémie du Covid 19, avec toutes les restrictions de déplacement, même si elles sont tout à fait logiques, légitimes et justifiées qui en ont découlé, ont été perçues comme des mesures d’hostilité supplémentaires de l’Algérie vis-à-vis de sa diaspora, diaspora qui voue aujourd’hui une haine de plus en plus marquée au pays de ses racines, pays qu’elle dit par ailleurs tant aimer. Quel gâchis! La France a compris tout ça et ne tardera pas à user de cette arme qu’elle a patiemment construite depuis des décennies.

    La situation actuelle

    Après avoir vécu de bout en bout et sans trop de dégâts la première phase du processus dit  » démocratique  » et exécuté dans ses moindres détails le scénario pensé et écrit il y a des décennies par l’Occident féroce, l’Algérie est à nouveau en train de vivre une période extrêmement difficile car assaillie de toutes parts : pandémie, sécheresse, incendies canicule, crise financière, voisinage instable et même souvent agressif, le tout dans un climat de défiance interne que le pays n’a jamais connu auparavant, même du temps du FIS. Pris en étau, le pouvoir clame et affiche sa bonne foi, son patriotisme, son engagement de faire de l’Algérie un pays fort, respectable et social.

    Il donne des gages et promet d’exécuter toutes les demandes et desiderata du peuple, lequel peuple voudrait bien s’extirper de la situation de citoyen d’un pays sous-développé et arriéré dans beaucoup de domaines dans laquelle il se réveille et qu’il découvre un peu tard, une fois le festin du baril à plus de 100 dollars terminé.

    Malheureusement, tous ces signaux sont perçus comme des signes de faiblesse, très loin du message que le pouvoir voudrait faire passer. Le peuple veut que tout change sans que lui ne change d’un iota.

    Et sans faire d’efforts, sans examen de conscience : personne n’est coupable à partir du moment où d’autres le sont parce qu’ils ont commis des actes plus répréhensibles que les siens, personne n’a volé à partir du moment où d’autres ont volé plus que lui, et seul l’Etat est chargé d’en faire ! Comment sortir de ce cauchemar? La tentation autoritaire est là, elle est latente et elle se manifeste d’une manière sporadique, parfois brutale mais, visiblement, elle n’a aucune portée réelle sur l’état d’esprit de la majorité du peuple et, surtout, de la jeunesse. Et, plus grave, l’Etat a perdu le contrôle de l’administration locale, celle qui constitue la courroie de transmission et le fer de lance de la volonté centrale pour faire appliquer les lois et les règles de la République au pays profond.

    Ses lois, ses instructions et ses ordres ne sont même pas pris en compte et quand ils le sont, ils sont accommodés à la volonté du fonctionnaire ou de l’employé qui est chargé de les appliquer. Cela n’est pas nouveau et a toujours survenu dans les Etats défaillants ou trop présomptueux de leur force.

    Personne ne sait ni n’ose prédire sur quoi tout cela va déboucher. Même la France, notre ennemi éternel et traditionnel, semblait à un moment indécise et quasi désemparée : que faire si l’Algérie basculait à son tour dans le chaos après la cuisante désillusion subies en Afrique et ailleurs ?Mais ces interrogations ne sont que passagères et ont été vite balayées par des motifs de politique interne, d’échéances électorales et, bien sûr, l’élément central et structurant qu’est la haine que l’ancien colonisateur a toujours vouée à ses anciens départements une fois indépendants.

    Et la France a repris comme jamais ses manifestations ouvertement hostiles, insultantes et mensongères par la bouche même de son premier magistrat.

    Et pis, elle dévoile au grand jour sa volonté d’utiliser la descendance de l’émigration algérienne comme arme de destruction de l’Etat algérien ! Du côté algérien, un président qui essaie de calmer le jeu et qui louvoie face à un ennemi puissant et féroce, quelques réactions de la part de quelques responsables politiques ou personnalités intellectuelles exaspérés par la férocité des médias et hommes politiques français, mais qui ne restent que des réactions individuelles, isolées et ne relevant aucunement d’un plan global étudié et mis en œuvre pour contrer notre ennemi éternel et traditionnel. Même l’expression  » se regarder en chiens de faïence  » ne peut plus qualifier les relations entre les deux pays car, parmi eux, il y a un chien méchant, féroce et agressif, celui de la France.

    L’Algérie possède chez elle et ailleurs les femmes et les hommes qui peuvent la sortir la tête haute du caniveau dans lequel ses dirigeants et son peuple l’ont enfoncée. Il suffit de leur faire confiance et de les écouter et, surtout, de les associer à la réflexion et à l’élaboration de la décision politique, économique et culturelle.

    Parmi les urgences, il faudra renouer les liens et le dialogue avec la diaspora algérienne, les rétablir avec elle, partout où elle se trouve dans le monde et particulièrement en France, là où elle est la plus nombreuse, et la former, la politiser, lui faire comprendre les enjeux pour former une ligne de front capable de défendre les intérêts de l’Algérie et d’endiguer les manœuvres agressives de ses ennemis à la tête desquels se trouve l’ancien colonisateur.

    Nous sommes loin de l’explication infantile de l’existence d’un lobby pied-noir qui s’opposerait et bloquerait la soi-disant volonté française d’établir des relations saines et amicales avec l’Algérie.

    Mohamed Chouieb*

    *Retraité, ancien cadre technique Sonipec

    Le Quotidien d’Oran, 17/10/2021