L’Algérie non retenue par les Brics : Un mal pour un bien

Selon les renseignements américains, l’Iran aiderait la Russie à fabriquer une usine de drones sur son sol

Etiquettes : Algérie, BRICS, Russie, Chine, Brésil, Inde, Afrique du Sud, Iran, Argentine, Arabie Saoudite, Egyptem Ethiopie, Emirats Arabes Unis,

Le fait de ne pas avoir rejoint les Brics ne doit pas être considéré comme un échec mais plutôt comme une leçon qui doit servir le pays à l’avenir. Il s’agit là « d’un mal pour un bien » qui permettra à l’Algérie de regarder la réalité en face. Regarder plus grand.

L’Algérie ne rejoindra pas cette année les cinq pays qui composent les Brics. Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud, réunis à Johannesburg, ont annoncé une expansion de leur bloc avec l’adhésion de six nouveaux membres : l’Iran, l’Argentine, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. L’Algérie, comme le Nigeria, n’a pas été retenu malgré un fort investissement dans sa candidature. Les critères pour le choix des nouveaux adhérents restent flous malgré la tentative du ministre russe des Affaires étrangères d’en définir les contours en citant «le poids, l’autorité et la position du pays candidat sur la scène internationale ». Si c’était réellement le cas, l’Algérie aurait vu son nom inscrit sur la liste des pays choisis mais il semble que les enjeux sont ailleurs.

La Russie à titre d’exemple, même si elle a affiché publiquement son soutien à l’adhésion de l’Algérie, pays allié de toujours, a plus grand intérêt à soutenir l’Iran. Ou disons-le, un intérêt plus récent et qui a besoin de plus d’attention. Faut-il rappeler que paralysée par les sanctions internationales, Aeroflot et d’autres compagnies aériennes russes ont choisi l’Iran pour principal atelier de réparation. Cela a bien valu une visite de Vladimir Poutine à Téhéran en 2022. Une visite pour dire au monde que la bonne relation entre Moscou et Téhéran va devenir un véritable partenariat : dans les domaines bancaire et financier mais aussi énergétique.

Selon les renseignements américains, l’Iran aiderait la Russie à fabriquer une usine de drones sur son sol. Certes, en plein conflit en Ukraine, les fake news font rage mais cela n’est pas impossible.En devenant un soutien militaire de poids pour Moscou, l’Iran saisie une opportunité de s’arrimer à un bloc composé de la Chine et la Russie et dans lequel gravitent les pays non-alignés sur l’Occident, ce qui lui permettra de desserrer l’étau et sortir de l’isolement que lui impose l’Occident. Quid de la Chine ? Ce pays a aussi soutenu la candidature de l’Algérie mais il a sûrement défendu encore plus celles de l’Arabie Saoudite, les Emirats et l’Egypte. La Chine est le plus important client pétrolier du Royaume, alors que la coordination avec la Russie via l’OPEP+ est cruciale pour soutenir les prix du brut.

Aussi bien pour l’Arabie saoudite que pour les EAU, rejoindre un bloc économique aussi important que les BRICS est logique dans la mesure où ils cherchent à élargir leurs liens commerciaux et à se développer en tant que plaques tournantes mondiales de transit. Pour les 5 pays des BRICS, c’est tout aussi important que d’inclure d’importants pays pétroliers comme l’Arabie saoudite, les EAU et l’Iran. Cela consolidera le contrôle des BRICS sur la production mondiale de pétrole. L’adhésion de ces économies pourrait faire basculer la puissance financière mondiale et créer un nouvel ordre. Le pays, qui abrite le canal de Suez, la voie navigable la plus importante du monde avec le canal de Panama, intéresse au plus haut point la Chine qui travaille sur son grand projet de route de la soie. Vu de Pékin, l’Égypte est donc une porte vers le Moyen-Orient et un passage stratégique sur les grandes routes commerciales Europe-Asie.

On peut en revanche s’interroger sur la pertinence d’intégrer l’Éthiopie qui reste parmi les moins développés du monde selon l’indice de développement humain du PNUD. Selon certaines analyses, l’Éthiopie a d’autres atouts, à commencer par sa démographie. Deuxième pays le plus peuplé d’Afrique avec 123 millions d’habitants, sa population augmente toujours à un rythme annuel supérieur à 2%. Ce qui n’était le cas d’aucun des BRICS fondateurs. Une tendance que les 6 nouveaux membres vont permettre d’inverser. Et à bien voir, dans ce choix des nouveaux adhérents, il n’ y avait pas que des intérêts économiques mais aussi politiques et stratégiques.

Abderrazak Makri, l’ancien président du MSP, affirme que « L’Algérie ne peut pas être membre des BRICS, en raison de la faiblesse de ses indicateurs économiques, notamment de son PIB, de ses capacités technologiques et de la productivité industrielle de notre pays ». Ce n’est pas faux mais ce n’est pas totalement vrai aussi. Et il faut se dire que le fait de ne pas avoir rejoint les Brics ne doit pas être considéré comme un échec mais plutôt comme une leçon qui doit servir le pays à l’avenir. Lui servir à réévaluer ses alliés mais aussi à consolider son économie. Il s’agit là « d’un mal pour un bien » comme l’a déclaré Soufiane Djilali, président de Jil Jadid qui appelle à prendre conscience des carences, évaluer les points forts et corriger les faiblesses.

En Algérie, gouvernants et peuple, doivent s’unir et renforcer le front interne pour réussir à construire un pays fort et solide qui n’aura plus à faire de demande pour intégrer un quelconque groupe mais se fera inviter. Il faut regarder la réalité en face, prendre le taureau par les cornes et changer les choses. L’Algérie a énormément d’atouts et de richesses et elle doit voir plus son intérêt à proximité : l’Afrique. Il faut regarder ensuite plus grand. Car l’Algérie est aussi un centre névralgique pour le sud de l’Europe et pour le Proche-Orient.

Amine Ghouta

Crésus, 26 août 2023

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